YVES JADOT
Du rêve américain au succès bruxellois
Mots : Servane Calmant
Photos : Anthonin Weber
Le rêve américain, il l’a vécu. L’entrepreneur belge Yves Jadot a exploité une flopée de restos à Manhattan où il est toujours propriétaire de plusieurs bars hype. Pour autant, il n’a pas oublié Bruxelles. Avec son associé Nicolas Vignals, maître mixologiste, il vient en effet d’y ouvrir Confessions, un élégant bar à cocktails et canapés gourmands. Rencontre avec Yves, un soir de novembre pluvieux, un « Generosity » (gin/safran/cannelle) réconfortant, à portée de lèvres.
A 18 ans, 100 dollars et de la niaque à revendre en poche, notre compatriote Yves Jadot saisit la promesse d’un job à La Crémaillère, un restaurant étoilé français à Bedford, dans l’Etat de New York. Pendant deux ans, il va se faire la main, comme on dit. 20 ans, l’âge de tous les défis. Yves monte à Manhattan où il gravit tous les échelons de l’horeca : serveur, bartender, manager, general manager même, de plusieurs restaurants et bars. Ça roule pour Yves ! Courage, détermination, prospérité, il vit pleinement le rêve américain. Qui lui laisse cependant peu de temps pour avoir une véritable vie privée. Or Yves tombe amoureux, se marie, fonde une famille. « Cette nouvelle étape dans ma vie était difficilement conciliable avec un travail de nuit », nous avoue-t-il. Alors Yves décide de se lancer à son propre compte. Il ouvre Petite Abeille, un restaurant belge à New York, qu’il essaime, il en gèrera quatre sur Manhattan. Suivront un restaurant mexicain, deux anglais, un vegan, et même une maison du croque-monsieur… Yves, entrepreneur visionnaire, a de (bonnes) idées à revendre. Quand on lui demande quel trait de caractère principal il faut pour survivre à New York, il réplique : « la polyvalence ». Et pour devenir un winner à NY ? « Ne pas voir peur de se retrousser les manches, ne pas craindre de ne rien gagner les premières années de labeur, travailler 7 jours/semaine, établir un business plan solide, se doter d’un bon réseau professionnel… ». Le message est clair : devenir un winner se mérite ! Yves Jadot, a-t-il croisé des stars dans ses bars ? « A l’époque de Titanic, Leonardo DiCaprio s’est installé à la table de « Petite Abeille » et il s’y est fait photographier. Quelle pub ! J’ai également rencontré pas mal de vedettes et politiques belges, qui étaient désireux de découvrir mes bars à cocktails. ». Comme chantait Frank Sinatra : « I want to be a part of it… New York, New York ». Rien n’a (vraiment) changé.
2020, la pandémie s’étend au monde entier. « Mon groupe comptait plus de 350 employés et 11 établissements performants. Mais les baux à New York ont une durée de 10 ans ; en fin de bail, un loyer peut bondir de 3000 dollars à 13 000. Il faut avoir les reins solides pour se développer à NY ! J’ai préféré me concentrer sur les bars à cocktails haut de gamme. »
Aujourd’hui, Yves Jadot est toujours propriétaire de quatre bars à cocktails new-yorkais (notamment Raines Law Room dans le quartier huppé de Chelsea et Dear Irving, du côté de Gramercy, tout aussi chic), il a décidé d’en lancer un 5e (ouverture en mars 2024) et il vient de miser sur un projet d’ecoresort à 1h30 de Manhattan. Des projets plein la tête mais les pieds bien sur terre, il nous confie : « Gérer un bar est nettement plus facile qu’un resto, et la marge bénéficiaire plus importante ». Il rit.
Et à Bruxelles ?
Pour l’heure, on fait la rencontre d’Yves Jadot dans son nouveau bar à cocktails, Confessions, situé à Ixelles, rue du Bailli, en face de l’Eglise de la Sante-Trinité.
Yves, pourquoi, diable, ouvrir un bar à Bruxelles quand on habite New York ? « Pendant la Covid, j’ai trouvé le temps long. Bruxelles où je retournais deux fois l’an, me manquait. Alors, j’ai cogité longuement : ouvrir un bar à cocktails m’a semblé une bonne idée pour y revenir plus souvent. (rire). La visite d’un espace libre à Ixelles, à deux pas de la place du Châtelain, dans un quartier multiculturel et aisé, a balayé mes dernières hésitations. A tout vous avouer : je compte bien en ouvrir un deuxième dans un avenir proche, avec mon associé ».
De fait, si derrière Confessions, on retrouve l’esprit visionnaire d’Yves Jadot, le savoir-faire de son associé dans cette nouvelle aventure, Nicolas Vignals, un maître mixologiste que tous les amateurs bruxellois de cocktails signatures connaissent bien, confère à l’adresse toute sa particularité et son caractère. C’est que Nicolas a déjà séduit les amateurs de cocktails dans de belles maisons : Arthur Orlans, le temple du gin à Bruxelles (auréolé par Gault&Millau d’un «Best cocktail bar of the Year 2022 »), et La Villa Lorraine, table étoilée où il officiait comme barman en chef. C’est d’ailleurs à la Villa que Nicolas a rencontré Basil Huvelle, alors chef de partie de l’institution étoilée.
Car c’est là toute l’originalité du concept de Confessions : mixer cocktails (8 créations et 20 classiques), bouchées gastronomiques délicieusement raffinées (brioche coppa bonite séchée sauce miso, sando au tartare de bœuf condiment à l’ail noir, on a tout apprécié !), atmosphère singulière (Anno Defeche pour le design d’intérieur et Adeline, la fille d’Yves, une jeune artiste émergente, qui signe ici des fresques murales) et musique (Jabeau, le fils de Yves, compositeur, a imaginé une expérience unique en associant musique et cocktails via des écouteurs audio mis à la disposition du client, soit une variation des accords mets-vins qui devient cocktails-mets-musique). « Servane, vous serez étonnée de voir à quel point les sons, la musique, peuvent éveiller des sensations gustatives », s’emballe Yves Jadot.
On l’aura compris, Confessions se profile comme un bar à cocktails bruxellois à la signature affirmée, d’autant que Yves Jadot a appelé 10 investisseurs belges issus de tous les milieux (sportifs, showbiz, horeca) pour soutenir son projet et attirer des happy few sur ses canapés soyeux. « C’est une formule que j’ai expertisée à New York. Mais je préfère que le client vienne pour l’excellence du lieu, que pour voir et être vu ! »
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