L'ART est dans le PLI
Peint, plié, articulé, déchiré.
Le pli sous toutes ses facettes ou pas, interprété par l’artiste belge Jean-Philippe Duboscq laissant place à une œuvre jamais stable et toujours en mouvement !
Et si on évitait de tout contrôler…
MOTS : ARIANE DUFOURNY
PHOTOS : ANNUSCHCHKA LEUNG
On naît artiste ou on le devient…
Je suis né dedans ! Mon père Jean Duboscq, ex aequo avec Pierre Alechinsky, a gagné le
« Prix de la Jeune Peinture Belge » rebaptisé « Belgian Art Prize ». Appuyé par mon professeur de sculpture, Félix Roulin, je suis entré à La Cambre à 16 ans. Ensuite, je suis passé à la musique tout en travaillant la peinture et les arts plastiques. Musicien et compositeur, pendant de nombreuses années, j’ai créé de la musique contemporaine et travaillé en collaboration avec des artistes comme Peter Downsbrough, Bram Bogart… En 2012, la Galerie Nardone m’a proposé une collaboration. Depuis je travaille avec des galeries à Hong Kong, Londres, Paris… c’est devenu une profession.
Votre art s’exprime par…
Suivant les époques, par de la matériologie, de la volumétrie, de l’abstraction, de l’abstraction lyrique, et aujourd’hui, par une approche plus conceptuelle de la peinture.
Votre peinture conceptuelle…
Elle amène une esthétique par une idée plutôt que par un désir de captation ou de contrôle. L’esthétique apparaît bien malgré moi, parce que ce que je cherche en réalité, c’est d’une part, une sorte de mobilité permanente, une mise en perspective de l’œuvre et d’autre part, à révéler ou à montrer ce que je ne peins pas, ce qui s’infiltre ou déborde. En fait, j’essaie d’être mon propre spectateur, d’avoir un plaisir à découvrir les choses plutôt qu’à essayer de les contrôler.
« Le pli est un mystère infini, c’est un contenant, une magie baroque qui ne supporte pas d’être mise en pleine lumière. »
De l’idée à la création…
L’idée est de travailler à partir de flux picturaux qui s’infiltrent tout en laissant une trace, une empreinte de leur passage. C’est une sorte de mémoire du pli qui prend l’apparence de taches, de Rorschach ou d’effets de miroir qu’au final je révèle ou pas.
Mes pièces sont généralement composées de plusieurs éléments interchangeables qui se présentent d’abord sous forme de tableau, mais qui par leur caractère modulable me permet ensuite de les déployer en installation. Une pièce peut donc être repensée et réorganisée pour s’approprier un espace ou un lieu, en donnant une nouvelle interprétation d’elle-même.
Techniquement…
Ce sont des toiles qui sont pliées et agrafées sur châssis. Ensuite je peins juste les surfaces pliées avec de larges brosses. Les encres ou la peinture se frayent un chemin au travers des couches successives. C’est en ouvrant ou plus exactement en arrachant ces plis que je dévoile ces cheminements inscrits en profondeur.
Un travail jamais identique…
Les plis sont pensés, pliés, articulés différemment et réagissent en fonction des toiles utilisées et de la viscosité de la peinture. Dans certains travaux, j’emploie des toiles contenant essentiellement du coton, pour que les plis s’ouvrent et se ferment en fonction de l’hygrométrie. L’œuvre n’est jamais stable et toujours en mouvement.
L’inspiration…
Gilles Deleuze « Le pli/ Leibniz et le baroque », l’âme comme « monade » sans porte ni fenêtre, qui tire d’un sombre fond toutes ses perceptions claires. En littérature, « La vie dans les plis » d’Henri Michaux, les poèmes « Pli selon le pli » de Mallarmé et repris en musique par Pierre Boulez. Le pli est fascinant : si on ouvre un pli, il ne reste plus rien. Ce que j’essaie de montrer, c’est la trace de ce pli. Je prépare une pièce, je travaille dessus et je retire des couches. Je retourne vers l’essentiel, la genèse de ce qui s’est fait.
Votre définition de la perfection…
C’est une question difficile. Je crois que nous savons tous ce que l’on entend par perfection, mais en réalité nous en avons chacun une vision ou une interprétation différente et peut-être qu’au même titre que la vérité, il n’y a de perfection que son concept.
JEAN-PHILIPPE DUBOSCQ
LC GALLERY
Rue aux Laines, 46 – 1000 Bruxelles
ELLIOTT, le chef qu’on n’arrête pas
On, c’est qui ? Moi, ma tête, mes mains ! Elliott Van de Velde, jeune chef de 29 ans, bouscule les habitudes de la gastronomie. Une cuisine sans code, zéro gaspi ! Il récupère la matière première, la transcende pour en faire profiter les personnes en besoin. Triathlète, il s’entraîne avec son dalmatien Cartouche.
Cette discipline lui permet de se retrouver pour renaître, grandir, tel un cerf qui perd ses bois.
MOTS : ARIANE DUFOURNY
PHOTOS : CHRISTIAN HAGEN
Son déclic…
Un oignon ! Je pleurais, non pas en l’épluchant, mais en découvrant ma vocation. Je n’avais jamais conçu la cuisine comme un métier.
Sa cuisine…
C’est une cuisine mouvante, contemporaine et curieuse, d’inspiration plurielle sans réel style dominant. Elle a un sens d’aventure, d’humour où le seul but est de satisfaire mes clients plutôt qu’un ego bravache.
Son concept…
Je twiste le côté rock’n’roll des tendances culinaires, l’exigence et le travail d’un étoilé dans des lieux insolites, à la maison ou encore même au bureau.
Son initiative zéro gaspi…
Ça m’excite d’avoir des légumes moches et d’en faire quelque chose de dingue, de rendre les produits au plus « parfait » de leur état : en coulis, pickles, purée, sautés, fermentés, grillés, et j’en passe… Je les pimpe suivant leur vraie personnalité, c’est un peu mes legos !
Changer les mentalités…
J’ai fait des levées de fonds pour Médecins du Monde, des dîners gastronomiques 6 services unique- ment avec de la récup. Il faut con- sommer local et saisonnier pour éviter la surproduction.
Son loft…
C’est devenu mon atelier de création, bureau et là où je reçois amis, clients proches pour des dîners privés où je peux me lâcher en cuisine. Modulable à souhait, il est à disposition pour des événements, séminaires et shootings.
Chez lui ou chez nous…
Totalement sur mesure, du 4 aux 22 services, de l’eau plate au millésimé introuvable, du brut à la forêt qu’on pourrait construire, des lumières aux sons et j’en passe. Illimité dans le sur-mesure tout en gardant mes valeurs et mon ADN !
Osez croire en ses rêves. Le sien…
Atteindre un niveau de connaissance et de réflexion digne des plus grands chefs et entrepreneur dans le domaine gastronomique.
« Mens sana in corpore sano »…
C’est devenu une devise, un mode de vie. Dans le sport ou en cuisine, me dépasser permet d’atteindre un but précis. Après mes temps passés en forêt ou en piscine, je ne suis pas le même chef. Mais j’apprends au fur et à mesure de mes échecs et de mes ambitions.
S’entraîner avec Cartouche…
C’est lui qui m’a amené à la course à pied. Je gagnais du temps sur mon planning en allant le faire courir pour le calmer. Ensuite, c’est devenu notre rituel. Il a bientôt 9 ans. C’est toujours lui le plus résistant, mais je commence tout doucement à le rattraper. Cartouche est increvable, je ne dois pas le décevoir !
La natation, son élément…
C’est le seul moment où je n’ai pas un téléphone qui sonne ou qui vibre et qui me permet d’être seul dans ma bulle.
Le triathlon…
Je faisais déjà des marathons. Ça s’est décidé par hasard sur un vélo chez mon père. J’avais des nouvelles sensations aux jambes et je devenais plus fort sur mes sorties running. Le triathlon est venu comme un nouveau challenge en même temps que la création de ma société. J’ai eu ma licence et mon numéro de TVA le même jour. C’était officiel, j’allais entamer un nouveau chapitre.
La nutrition, gage de réussite…
C’est essentiel durant l’entraînement ou avant une course. Lors de mon premier triathlon, j’ai bu un Aquarius et mangé une banane comme si j’étais sur un 10km. Je suis sorti de l’eau 25ème, tout le monde était « youah dingue » ! Ensuite sur mon vélo, je n’avais plus de force. Je suis arrivé 160ème, donc véritablement dernier, en titubant parce que je n’avais plus d’énergie après 45 minutes d’effort.
Chef et triathlète. Sa recette de gestion du temps…
Je m’entraîne au moins 7 à 10 heures par semaine pour la forme. Mais 3 mois avant un Ironman, j’ai un planning bien plus strict à concilier en fonction de mes événements.
Sa préparation à la compétition…
Je m’entraîne tout le temps par mon travail, à force de rester debout, lutter contre le sommeil, gérer le stress. En somme, une préparation mentale. Physiquement, il faut rester soi-même et connaître ses limites. Je suis né avec ce mental : aller au bout des choses et de me surpasser.
L’excellence, un objectif à atteindre…
Il faut toujours la garder en ligne de mire, car au final c’est l’excellence qui fait qu’on se dépasse constamment. Je me remets tout le temps en question pour l’atteindre et c’est devenu un jeu. J’aime la difficulté et la dureté de mes efforts et j’en viens vraiment à supporter l’insupportable pour l’atteindre.
Sa définition de la perfection…
J’ai toujours eu du mal à entendre, c’était parfait. Les personnes qui m’ont fait prendre conscience de mes imperfections sont celles qui ont rendu mon monde tel que je le conçois maintenant. Imparfait dans un but de perfection !
LITTLE CHEF
Rue Pierre Grassée, 9-11 – 1080 Bruxelles
T : 0472/92 28 06
On ne change pas une recette... QUI PLAIT!
Est-ce là la devise favorite de la dynastie Niels, incontournables patrons des brasseries belges ? Elle prend en tout cas tout son sens à la lumière de leurs aveux. Albert-Jean Niels (65 ans) et son fils, Frédéric (41 ans), respectivement 3e et 4e générations héritières de Joseph Niels, restent en effet fidèles au fameux filet américain frites inventé en 1924 par Joseph, leur ancêtre. On l’a savouré avec gourmandise Au Savoy, dernière-née de la famille.
MOTS : SERVANE CALMANT
PHOTOS : BERNARD DE KEYSER
L’Américain, une opération marketing ? On a posé franco la question à Frédéric Niels. « Pas du tout. Son histoire est liée à celle de mon grand-père, Joseph Niels. Avant d’ouvrir la taverne Canterbury en 1926, mon grand-père travaillait au restaurant La Royale dans la Galerie Saint-Hubert à Bruxelles. Il n’était pas content de la préparation en salle du steak tartare (d’origine française, N.D.L.R.) car elle était sujette à de nombreuses variations : le garçon de salle assaisonnait trop ou trop peu selon, disons, son humeur ! Cela n’avait pas échappé à l’acuité de Joseph qui a dès lors imposé une élaboration minutieuse de la préparation… en cuisine. Depuis les années 20, tous les ingrédients qui composent l’Américain y sont scrupuleusement pesés. C’était – et c’est toujours – l’unique moyen d’offrir aux clients régularité, constance, et saveurs équilibrées. » En résumé : l’Américain n’est pas américain (nos amis étasuniens mangent d’ailleurs rarement de la viande crue) mais bien 100% belge voire 100% bruxellois.
Au Savoy, un clin d’œil à… « J’aime travailler en famille, mon père, Albert-Jean, est d’ailleurs mon associé Au Savoy. Quant au nom, c’est un gentil clin d’œil au célèbre Savoy Hotel de Londres où Joseph, mon arrière grand- père, toujours lui, a été engagé comme garçon d’étage dans les années 1900… », poursuit Frédéric.
Place Brugmann à Ixelles, the Place to Be ? « Avec Au Savoy, on voulait à nouveau marquer notre présence dans ce beau quartier prisé d’Ixelles où mon père et moi sommes nés. Place Brugmann, c’est un juste retour aux sources. »
C’est du belge. « C’est du belge en effet, avec une carte fixe qui propose un maximum d’aliments de producteurs locaux expérimentés, en circuit court donc, et pas mal de suggestions mensuelles tant au niveau des plats que des vin. Croquettes, frites, sauces, glaces, tout est fait maison ! », souligne le maître des lieux.
« Je veux une brasserie conviviale avec du bruit, de la vie. Du fait maison, du bon, du rapide ! »
Frédéric Niels
Que ça vive ! « Au Savoy, on mise sur un cadre élégant, qui fait la part belle aux artisans belges, pour le bois, pour le cuir, et à l’art, de nombreux tableaux de notre collection privée sont en effet accrochés aux cimaises (dont une œuvre colorée de Nicolas Party). Quant à l’ambiance, je la veux résolument décontractée, chaleureuse, sans chichis. Le bar est d’ailleurs l’élément central du lieu, on peut s’y attabler pour boire un verre ou prendre un petit-déjeuner. Je désire une brasserie qui vive ! On a bien évidemment fait le maximum en terme d’isolation sonore, mais je veux entendre du bruit, de la vie, pour que perdure l’esprit brasserie parisienne qui me tient tant à cœur », s’enthousiasme Frédéric Niels.
La terrasse ou le bar ? « Deux incontournables, d’autant que le bar est frontal à l’entrée, une position stratégique pour voir et être vu », s’amuse notre hôte.
Be Perfect vous recommande. Les incontournables : le jus de tomates frais (pour le plein d’antioxydants), les Oostendse grijze garnaalkroketten maison (en VO dans le texte, parce qu’elles sont dorées et croustillantes à l’extérieur et qu’il y a beaucoup de crevettes dedans), le filet américain (parfaitement assaisonné, on vous le confirme), l’entrecôte grillée (parce que c’est de l’Irish beef et que l’Irlande étant constituée de 80% de pâturages, l’animal y mène une vie relativement paisible. No stress = bonne viande).
Recette du « Filet Américain » inventée par Joseph Nielsen 1926 et inchangée depuis lors !
Viande de bœuf crue hachée gros, 1er choix, grosse cuisse ou tâche noire (plus de goût) bien dénervée.
+ sauce mayonnaise (préparée avec 4 jaunes d’œufs au litre) renforcée en piccalilli haché finement.
+ sel, poivre, véritable sauce anglaise (Lea & Perrins), oignons et persil finement hachés, câpres.
> Bien mélanger avec une fourchette en bois pour arriver à une bonne onctuosité.
> Servir bien entendu avec des pommes de terre frites belges (bintje) pas trop épaisses, un peu de cresson de rivière, oignons et cornichons aigre- doux, qui ne tuent pas le goût de la viande.
Les Niels
Ce sont deux branches familiales. Albert-Jean et Frédéric gèrent Au Vieux Saint-Martin (l’institution du Grand Sablon, depuis 1968), Au Grand Forestier (Watermael-Boitsfort, depuis 2015) et Au Savoy (The new place to be, place Brugmann, novembre 2018). Philippe Niels étant quant à lui à la tête de Nielsvins (Bruxelles) et du (new) Canterbury (à Ixelles).
AU SAVOY
Ouverture à 8h. Petit déjeuner de 8h à 11h. Cuisine non-stop de midi à 22h30, sauf le vendredi et samedi jusqu’à 23h30.
Place Brugmann 35 – 1050 Ixelles
Attention : pas de réservation – venez tôt.
www.ausavoy.be
Bruno Erpicum
Bien sûr qu’une construction transforme l’environnement. Mais un bâtiment peut aussi épouser la nature qui l’abrite. Il peut l’intégrer en la magnifiant, en la faisant rejaillir. Ramener le monde extérieur à l’intérieur, c’est là tout le talent de Bruno Erpicum, architecte passé maître en lecture de l’environnement et justesse des proportions, seul élément de décoration que le Belge s’autorise…
MOTS : NICOLAS DE BRUYN
PHOTOS : JEAN-LUC LALOUX
Un diplôme d’architecte décroché à Saint- Luc Bruxelles en poche, notre compatriote Bruno Erpicum s’en va découvrir l’Afrique du Sud et les Etats-Unis… Voici une info qui n’a rien d’anecdotique car c’est bien le somptueux théâtre de la nature qui va animer l’architecte. « Tout ce que je fais est éphémère mais si la nature peut reprendre ses droits une fois l’ouvrage terminé, c’est que je n’ai pas trop mal travaillé!», s’enthousiasme d’emblée ce fervent défenseur d’une architecture centrée sur l’essentiel, notion-phare de l’architecture moderniste du 20e siècle dont Mies van der Rohe fut l’un des illustres représentants.
« Je veux exposer les matières en m’interdisant toute forme d’habillage. »
Mais c’est quoi « l’essentiel » pour l’Atelier d’Architecture Bruno Erpicum et Partenaires (AABE), un bureau qu’il a créé en 1988 avec douze architectes actifs partout dans le monde ? En quelques mots, on pourrait dire que Bruno Erpicum balaie d’un revers de main tous les éléments qui parasitent le regard. A ses yeux, une construction doit laisser s’exprimer le terrain qui l’accueille, l’épouser pour le meilleur. « Le paysage », nous lance-t-il, « doit rentrer dans l’intimité du bâtiment. » Et la déco ? Il la rejette – la beauté d’un bâtiment s’exprimant par la justesse des proportions. La déco sans les éléments décoratifs, voilà son credo. Une épure qui n’enlève pourtant rien au caractère chaleureux des pièces à vivre, qu’il aime baignées de lumière. Pour vivre heureux, vivons avec la nature ! Architecte philosophe, Bruno Erpicum excelle dans l’art de ramener le monde extérieur à l’intérieur, c’est même là sa signature. Quant aux utilitaires, éclairage, prises, écran … , il intègre intelligemment ces éléments qu’il ne saurait voir dans l’architecture !
Du tac au tac avec Bruno Erpicum
Au commencement était… l’emplacement. C’est le terrain de jeu favori de Bruno Erpicum. « Un projet, c’est avant tout une attitude par rapport à l’environnement, une réflexion sur l’implantation du bâtiment sur son site. 90% des éléments d’un projet d’architecture sont dictés par le terrain. La notion d’intérieur/extérieur est d’ailleurs très stimulante. J’aime ce concept d’«être à l’extérieur à l’intérieur ». Pour tout vous avouer, durant ma première visite, je souhaite ne pas être accompagné par le client, pour ne pas être influencé. Et le jour où je me sens prêt, quelques coups de crayons suffisent pour donner vie au projet… »
La nature. « Je prends vie au projet même si, par la suite, le travail de mise au point reste important. Ainsi l’écorce d’un arbre : on a bâti une une maison qui accompagne l’écorce d’un arbre mais qui ne la suit pas. On a coulé du béton, 30 centimètres chaque jour sans le vibrer, le béton définissant la limite de l’écorce. A l’arrivée, on a créé une promenade autour d’un arbre. »
A poil ! « J’aime le béton. On peut le lisser mais aussi le texturer. Il prend la forme que l’on veut et raconte son histoire. Step by step, au fil de l’évolution de ma réflexion sur l’architecture, j’ai d’ailleurs pris la décision d’enlever la peinture que je considère comme une forme de décoration. Je veux exposer les bâtiments en m’interdissant toute forme d’habillage. On construit le bâtiment et on enlève les coffrages. Une fois le coffrage enlevé, mon bâtiment est terminé : les annotations des ouvriers sur les voiles de béton faisant d’ailleurs partie de l’objet construit. »
La lumière. « Indépendamment des fenêtres, comment, par exemple, faire entrer de la lumière dans un bâtiment ? Comment jouer avec l’ombre ? Au Portugal, j’ai demandé à l’entrepreneur de laisser quelques grains de sable entre le coffrage et le sur-panneau de coffrage pour que la lumière puisse laisser s’exprimer la force de la matière. Les imperfections m’intéressent beaucoup car elles montrent le vrai caractère du matériau. »
« Je prône l’abolition de la décoration au profit de la justesse des proportions à travers la lumière, la matière, les textures, le toucher.
L’architecture, c’est la vie ! »
Les matériaux naturels. « J’aime beaucoup le travertin qui se patine et s’embellit au fil du temps, les plans d’eau qui ramènent le ciel sur la terre, la crête des arbres qui vient couronner un bâtiment, les croûtes de schistes clivées, quand il pleut – et il pleut souvent chez nous -, c’est super beau ! »
L’horizontalité. « Le premier balayage du regard est horizontal. Travailler de manière verticale, il faut vraiment le vouloir ! Ca m’est arrivé à Uccle où le terrain imposait de travailler dans la verticalité : j’ai voulu aller dans la terre, comme si j’allais dans le ventre de la Belgique pour prendre la pierre bleue, telle quelle, c’est à dire sous forme de croûtes non polies, non travaillées. On a fait une ode à la pierre bleue belge pour que le bâtiment vertical puisse sortir de la terre. »
ATELIER D’ARCHITECTURE BRUNO ERPICUM & PARTNERS
Avenue Baron Alabert d’Huart, 331
1950 Kraainem
T : 02/687 27 17
Le CHIC & COOL du CHEF
Et si vous deviez recevoir une deuxième étoile ? « Je ferme ! L’exigence à outrance tue le plaisir, ça ne m’intéresse pas ! » Mathieu Jacri est un chef comme on les affectionne : franc du collier dans le verbe, sincère dans l’assiette. C’est d’ailleurs au comptoir-bar, avec vue frontale sur la cuisine qu’on dégustera, en toute décontraction, notre caviar Baeri et ses saveurs iodées. Le chic, c’est de ne pas faire briller les choses plus qu’il ne faut…
MOTS : SERVANE CALMANT
PHOTOS : MIREILLE ROOBAERT
Bruxelles. Rue de l’Abbaye à deux pas de l’avenue Louise. On s’arrête devant une maison de maître d’une élégance bourgeoise résolument intemporelle. Un voiturier nous attend. On franchit le seuil de la porte, et c’est la ville qui s’efface, laissant découvrir un havre intimiste tourné vers la haute gastronomie. Atmosphère classieuse mais comptoir-bar décontracté. Le chic, c’est la griffe Degand. Le casual, c’est la patte Jacri. La dualité séduit.
Explications. Fin 2015, La Villa Emily voit le jour, succédant à Emily Ristorante, l’ancienne maison de bouche que Pierre Degand avait ouvert pour sa fille. Il va sans dire que la déco du célèbre tailleur bruxellois était tirée à quatre épingles ! Elle l’est toujours ! Raffinée, élégante, chic, romantique, sans fausse note aucune, La Villa Emily, désormais placée sous l’égide de Serge Litvine (La Villa Lorraine, Villa in the Sky, Odette en Ville), s’épanouit dans un cadre exquis qui doit beaucoup à Degand, le gardien du bon goût. La séduction opère d’ailleurs jusque dans les moindres détails. Au rez-de-chaussée, on reste en admiration devant le marbre du comptoir-bar qui jouxte une cuisine toute en longueur ; au bout du comptoir, un boudoir abrite une table – on craque ; à l’étage, le mobilier racheté à l’Hôtel Crillon distille le charme des palaces immuables ; et puis, et puis il y a ce lustre vénitien fabriqué à Murano tout bonnement somptueux qui, de ses 5,30 mètres de haut, darde douceur et flamboyance sur les deux salles… Y’a-t-il endroit plus délicatement feutré à Bruxelles ? Pas sûre…
Dans la cour des grands. Avec ses 25 couverts, La Villa Emily joue dans la cour des grands. Son chef, Mathieu Jacri, 35 ans, a en effet raflé une étoile au Michelin un an à peine après avoir été engagé par Serge Litvine. Il faut dire que Mathieu a été biberonné à bonne école : Christophe Hardiquest (Bon-Bon) lui a mis le pied à l’étrier, tout en lui apprenant à respecter le produit ; Jean-Pierre Bruneau, Alain Ducasse et Pascal Devalkeneer (Le Chalet de la Forêt) ont partagé avec lui leur savoir-faire. De quoi avoir le gros cou ? C’est mal connaître le chef. « Je suis un employé comme les autres », tempère-t-il, peu sensible aux louanges empressées et flatteries dociles. « L’étoile Michelin n’a jamais été un objectif dans ma carrière. Je suis content de l’avoir reçue : elle nous a amené des curieux, pendant huit mois, on a même manqué de places pour nos habitués ! Aujourd’hui, l’effet buzz est un peu retombé et on retrouve, avec plaisir, nos clients familiers », conclut-il avec pertinence.
Lunch entre amis. Ce midi, c’est donc au comptoir-bar avec vue frontale sur la cuisine où s’affairent le chef et son second, Antoine Culot, que l’on va se laisser séduire. A nos côtés, deux habitués – c’est bon signe. La carte est courte mais déroule des propositions plus qu’alléchantes. Ainsi le caviar repose sur un lit de poireaux de Créances : c’est le seul poireau en France garanti par une IGP (une indication géographique protégée), il pousse donc en zone côtière et s’accommode royalement avec le caviar et le velouté iodé du chef. Un régal – notre coup de cœur. Les langoustines sont escortées d’un risotto de courge et bouillon thaï – un délicieux goût de voyage. Le dos de bar rôti ? Simplement accompagné de petits artichauts et arrosé d’un jus à la niçoise – quand le produit est bon, il se suffit à lui-même, pas la peine d’en faire trop ! Confirmation par Mathieu Jacri : « Je suis l’artisan d’une cuisine gourmande qui met le produit en avant. En osmose avec le cadre, je travaille des produits de luxe que je me refuse de dénaturer, je ne revendique d’ailleurs aucun plat signature, et j’espère faire preuve d’une belle maîtrise des sauces ».
Notre avis. La cohue, la ville, dehors. La paix, l’élégance dedans. Nous voilà conquise par une assiette exquise en parfaitement résonance avec l’atmosphère délicieusement raffinée de La Villa Emily.
En tête à tête avec Mathieu Jacri
Il l’a dit : « Je n’ai nullement la prétention de changer le visage de la gastronomie belge, Certes, j’y ai ma place. Mais avant tout, je fais ce que j’aime. »
Son plat favori ? « La salade Caesar, tout simplement. Je m’en suis d’ailleurs inspiré pour une de mes mises en bouche. » On confirme.
Le produit qu’il préfère travailler ? « L’oignon, les bettes – le travail sur les légumes est hyper créatif. Quant aux produits de luxe (homard, langouste, caviar…), j’essaie surtout de ne pas les dénaturer. »
Ce qui l’inspire ? « Les saisons. »
Là où il se sent bien ? « Avec ma famille. »
Comptoir ou salle ? « Deux clientèles différentes. Ceux qui ont goûté au comptoir y restent. L’inverse est vrai aussi. La nuance : le soir, on peut manger à la carte au comptoir, alors que les menus sont imposés en salle ».
Le plus beau compliment reçu à La Villa Emily ? « J’ai passé une superbe soirée, merci – rires. »
Le maître d’hôtel et sommelier des lieux ? « Cédric Wautier, qui a fait ses armes chez Yves Mattagne (au Sea Grill puis chez Yùme). »
LA VILLA EMILY
Rue de l’Abbaye 4 à Bruxelles
Tél. : 02 318 18 58
info@lavillaemily.be
www.lavillaemily.beOuvert du mardi au vendredi de 12h à 14h et de 19h à 22h, le samedi de 19h à 22h.
THE OFFICE TO BE
Fosbury & Sons, le nouvel espace de coworking, révolutionne la vision du travail en ouvrant ses portes, à Boitsfort, dans l’iconique tour moderniste de l’architecte belgo-polonais, Constantin Brodzki. The office is dead, long live the office !
MOTS : ARIANE DUFOURNY
PHOTOS : JEROEN VERRECHT
A l’orée de la Forêt de Soignes, à dix minutes de l’avenue Louise, l’ex-siège du CBR ne sera pas détruit ! Seule construction belge reconnue par le Musée d’Art Moderne de New York illustrant « Les Transformations dans l’Architecture Moderne entre 1960 et 1980 », il fut construit dans les années ‘70 sur les plans de l’architecte belgo-polonais, Constantin Brodzki. Le bâtiment de neuf étages au caractère monolithique fut créé à partir de 756 modules courbes en béton, composés de fenêtres ovales devenues mythiques. Cette façade si particulière a séduit les fondateurs de Fosbury & Sons, Stijn Geeraets, Maarten Van Gool et Serge Hannecart et nous aussi !
« Le caractère de l’édifice, son histoire, son architecture exceptionnelle, l’esprit de l’époque à laquelle il a été construit : tout nous correspond parfaitement. Son architecture est exceptionnelle et il est aussi très fonctionnel ».
Stijn Geeraets
A présent, Fosbury & Sons « Boitsfort » occupe 7.000 mètres carrés répartis sur sept des neuf étages du bâtiment. Oubliez les horodateurs, plus de temps perdu pour vous garer ! L’immeuble compte aussi trois niveaux souterrains pour le parking.
Il dispose d’une capacité de 600 personnes et 250 entreprises différentes qui se répartiront des suites (bureaux privés), des studios (bureaux privés collectifs), 15 luxueuses salles de réunion (équipées de toutes les technologies) et des lieux de détente logés au sein d’espaces de travail communs. Son plus ? Des bureaux où on ne se sent jamais confinés notamment dû aux portes vitrées. On craque sur la table de billard et la cuisine ouverte.
Ce qui rend le travail si stimulant ? Le lobby du rez-de-chaussée est l’endroit idéal pour travailler et rencontrer des gens au restaurant Coffeelabs. Pour un moment plus exclusif, on se rendra au bar « Giorgio ». Du haut de son huitième étage, il offre une vue panoramique sur la Forêt de Soignes.
Fosbury & Sons lance également une toute nouvelle application mobile afin de relier les membres entre eux et stimuler les échanges dans la vie réelle. Ainsi, vous pourrez indiquer le nom des personnes avec qui vous souhaiter déjeuner, prendre un café ou défier au billard !
Le coworking n’est pas encore entré dans vos mœurs ? Vous risquez fort de changer d’avis en franchissant les portes du nouvel espace Fosbury & Sons. Sa vision innovante du « bureau » relègue nos habitudes ancestrales au pilori. Vous êtes freelances, nomades numériques, employé-es de petites ou de grandes entreprises, en devenant membre, vous profiterez d’un bureau professionnel hyper design jumelé au confort des salons, d’un restaurant healthy, de loisirs et de nombreux services qui amélioreront votre vie pendant et après le travail. Place à l’innovation, au partage, aux échanges, pour faire fleurir votre créativité !
FOSBURY & SONS
Chaussée de La Hulpe, 185
1170 Watermael-Boitsfort
fosburyandsons.com
LIÈGE et la CAPITALE,UN PONT c’est tout
Bruxellois, Liégeois. Je t’aime moi non plus ? Julien Blaise adore sa cité ardente. Pourtant, il habite et travaille dans la capitale où il recrée son cocon de convivialité typiquement liégeoise. Président de l’ALTB, il s’active à créer un « pont » sur des axes socio-économiques et culturels entre les deux villes.
MOTS : ARIANE DUFOURNY
PHOTO : ERIC BOUVIER
Julien Blaise, son parcours…
Je suis né en 1982. J’ai fait des études d’ingénieur commercial (HEC ULiège). Ensuite, j’ai bossé dans le monde informatique en tant que consultant. A 30 ans, j’ai eu envie de me réinventer. J’ai suivi Charlotte, qui depuis est devenue mon épouse, à Boston où j’ai fait un break : j’ai étudié à « Harvard Extension School » en cours du soir. Ensuite, j’ai lancé ma boîte « asUgo » qui s’occupe de conseil en stratégie client.
Mon travail ? Mener, diriger une équipe spécialisée dans l’interaction client et aider les entreprises à redéfinir la façon dont elles interagissent avec leurs clients. Nous fournissons une solution technologique pour accompagner également le point de vue technique. Nos clients ? Lampiris Total, IBA, CESI, Sibelga, etc. Hormis mes activités professionnelles, je suis très fier d’être devenu le président de l’ALTB en 2017.
ALTB, la genèse…
L’Association des Liégeois Travaillant à Bruxelles est née il y a 31 ans dans une période difficile pour Liège, tant au niveau économique que politique. L’idée était de s’appuyer sur notre sentiment d’appartenance fort pour échanger des idées, des visions autour du redéploiement de notre cité ardente.
Un message ardent…
Didier Matray, Jean-Guy Lakaye et Jean-Jacques Verdickt, fondateurs de notre association ont rappelé les valeurs d’optimisme et de convivialité qu’ils voulaient véhiculer et qui nous sont chères aujourd’hui encore. « En 1980, se définir comme Liégeois à Bruxelles était comme se définir chauffeur Uber devant une assemblée de taxis ».
Un cercle de réseautage à Bruxelles …
Cette association réunit l’ensemble des forces vives liégeoises développant des activités professionnelles à Bruxelles. Avec la nouvelle présidence et la nouvelle équipe, nous avons voulu rallier à nos forces l’ensemble des acteurs voulant œuvrer à des échanges entre Liège et Bruxelles. Nous voulons créer un « pont » entre la capitale et notre cité ardente sur des axes socio-économiques et culturels, rallier, fédérer et fidéliser tous les porteurs de projets unissant nos deux villes et qui partagent trois valeurs essentielles: Convivialité – Optimisme – Vision.
Les orateurs…
Des politiques dont Didier Reynders, Jean-Claude Marcourt, Daniel Bacquelaine, des entrepreneurs à succès « inspirants » comme Bruno Venanzi, Thomas Mémurlin et Roberto Navarro qui ont lancé « Huggy’s Bar », Renaud Pirotte et François Dethier qui ont créé la bière liégeoise « Curtius », des gens du monde culturel, notamment le peintre Philippe Waxweiler ou encore issus du domaine médical ; le Professeur Jacques Brotchi nous a parlé de la greffe de l’extrême : une tête sur le corps d’un autre. Prochainement, nous recevrons Julien Penders, le fondateur de « Bloomlife », la start-up qui monte dans la Sillicon Valley. On aime les cuisiner à la Liégeoise ! En outre, nous mettons en valeur nos membres. Chaque mois, l’un d’entre eux est mis en « lumière ».
Vos projets futurs…
L’un des nouveaux projets qui nous tient particulièrement à cœur est l’organisation du Gala Liégeois. Une soirée de prestige, portée par des personnalités du monde politique, culturel et entrepreneurial pour mettre à l’honneur les « ponts » entre nos deux villes. Une soirée responsable également, l’entièreté des bénéfices étant reversée à un projet caritatif actif à Bruxelles (Les Docteurs Zinzins en 2018).
La prochaine édition (la deuxième) aura lieu le vendredi 22 mars 2019 au Château Sainte-Anne à Bruxelles. La date symbolique de l’événement nous a conduit cette année tout naturellement vers l’association V-Europe – Association Belge des Victimes du Terrorisme.
J’avoue avoir été particulièrement interpellé par le témoignage de son cofondateur Philippe Vansteenkiste (frère de victime) : « C’est important que les gens se rendent compte de ce que c’est d’être victime du terrorisme. Être victime de terrorisme, c’est être utilisé comme un outil contre l’État et les valeurs de notre société. Cela implique un processus de reconstruction extrêmement complexe ».
A la recherche des récits oubliés
Voyageuse de la planète et du cœur, Axelle Delhaye chine des bijoux anciens à travers le monde, de l’époque 1850-1930.
PHOTOS : KRIS DE SMEDT
Passionnée d’art, de mode et de joaillerie, elle compose ses créations à partir d’un bijou existant en le transformant pour lui donner une autre vie, lui confier une nouvelle mission. Chaque pièce est unique et véhicule une portion d’âme.
A quelques pas de la place Brugmann, on entre dans son salon boudoir comme on se rend chez une amie où tout n’est que finesse et délicatesse. En plus de ligne personnelle d’Axelle, on y trouve un concept de collections très pointues et toujours sexy.
Envie d’un percing ? La seule boutique de petite joaillerie à Bruxelles organise, presque tous les mois en soirée et sur rendez-vous, des ateliers piercing autour d’une coupe de champagne !
AXL Jewelry Shop
Rue Mignot Delstanche, 51
1050 Bruxelles
www.axl-jewelry.com
Des CHIFFRES et des LETTRES
Alexis Michalik en chiffre, c’est à 35 ans,4 pièces en 5 ans : Le Porteur d’histoire,Le cercle des illusionnistes, Edmond et Intramuros. Toujours jouées, elles totalisent à ce jour pas moins de 4.050 représentations, en France et dans plus de 12 pays dont les États-Unis, l’Algérie, le Liban ou encore la Belgique… avec comme cerise sur le succès public une moisson de 10 Molières !
Quant aux lettres, Alexis en a de solides.Le garçon, qui a grandi sans télévision, fonce à la bibliothèque, lit des tonnes de BD, et se régale avec Dumas, Rostand, Shakespeare, Pennac…
Rencontre à Bruxelles avec un homme courant mille lièvres à la fois pour être sûr de concrétiser au mieux tous ses projets.
MOTS : FRÉDÉRIQUE MORIN
PHOTO : MARY BROWN
Le secret de votre succès ?
Je ne me bride pas narrativement. C’est ça qui fait que les pièces fonctionnent. Quand je raconte une histoire, je raconte d’abord l’histoire la plus riche et la plus compliquée possible. Ensuite, lors de la mise en scène, je cherche à la rendre la plus limpide possible à un public.
Je pense que ce qu’aiment les gens, c’est de retrouver des sensations qu’ils auraient plutôt devant une série ou dans un bon bouquin et pas forcément au théâtre !
La forme théâtrale a aussi son importance : pas de tête d’affiche, essentiellement des rôles équivalents… permettent également la longévité du spectacle dans son exploitation. Qu’un acteur soit remplacé ne change rien… l’histoire, la dynamique sont toujours là.
Que cherchez vous en racontant vos histoires ?
Ce que je veux c’est accrocher un public, c’est amener une émotion, c’est faire dire quelque chose à ce spectacle. S’agissant d’Edmond : comment Edmond Rostand est passé du statut de total looser au statut d’auteur célébré. Comment on passe d’une pièce à laquelle personne ne croit à un triomphe total. À cela, je rajoute qu’il l’écrit en 3 semaines. Ce n’est pas la réalité… mais moi, j’ai écrit Le porteur d’histoire en 3 semaines !
Entre Shakespeare et Molière, qui choisissez-vous ?
Shakespeare, complètement ! Molière n’est pas trop ma tasse de thé. L’école anglaise, c’est raconter des histoires qui ne sont pas dans l’auto fiction, des histoires « bigger than life ». L’école française, ce sont autant d’histoires racontées de et à l’intérieur, des préoccupations bour- geoises… et ça au théâtre, dans les romans et dans les films !
Pourquoi avoir fait le choix du théâtre privé et non du théâtre public ?
J’aime la logique du théâtre privé. J’aime que ce soit simple : il y a des gens dans la salle… le spectacle continue ! Il est important pour moi que les gens qui m’ont fait confiance ne perdent pas leur chemise. C’est la seule manière pour moi de ne pas me sentir redevable.
Si jamais on est bon, si tout le monde est content, si les acteurs sont payés, si les producteurs se sont remboursés et gagnent des sous, alors c’est une opération qui a réussi. Cet aspect économique est toujours présent… et je pense que ce sera toujours le cas. Même si demain je fais un énorme show à Broadway, ce show devra rester viable.
À voir et à lire
Le porteur d’histoire au théâtre Le Public, avec une troupe 100% belge ! Jusqu’au 31 décembre.
Edmond :
• à Bozar le samedi 29 décembre pour deux représentations, à 15h et 21 h
• au théâtre Le Public en septembre 2019
• l’adaptation de la pièce au cinéma, sera dans les salles le 9 janvier 2019, avec notamment Olivier Gourmet au générique
• c’est aussi une BD de Léonard Chemineau aux éditions Rue de Sèvres
• le livre, reprend le texte de la pièce. Editions Albin Michel, 2016
La BRASSERIE SHARE-FOOD PESAGE, Droh!me Park
On n’y croyait plus : l’hippodrome d’Uccle-Boitsfort, rebaptisé Droh!me Melting Park, retrouve enfin son effervescence ! Le mérite en revient notamment à la Jadot Family qui offre au bâtiment du Pesage une véritable résurrection. C’est dire notre excitation joyeuse à nous mettre à table…
MOTS : SERVANE CALMANT
PHOTOS : PIERRE VACHAUDEZ
Ces gens-là. D’abord il y a Lionel, qui fait tout de ses 10 doigts. Lionel Jadot, star belge de l’architecture d’intérieur, artiste éclectique, designer
atypique. On aime tellement son anticonformisme qu’on lui a consacré plusieurs pages dans notre Be Perfect de mars 2018. D’abord encore, il y a la sœur, Sandrine, qui aimerait avoir l’air et qui l’a l’air : le lancement d’Odette en Ville et du Chalet Robinson, c’est elle. Et pas qu’elle : Charlie Delval, 24 ans, le fils de Sandrine, de l’enthousiasme à revendre, nous accueille. Il assiste sa mère (et vice-versa) dans la gestion du Pesage, au quotidien, c’est à dire avant, pendant et après le service.
Cet univers-là. Ah, l’hippodrome de Boistfort, qui est en fait situé à Uccle, qui fut un lieu incontournable de convivialité, à propos duquel on a toutes et tous une kyrielle de souvenirs à raconter avec l’oncle Paul debout dans les petites tribunes, que les pouvoirs publics ont laissé à l’abandon pendant 20 ans… Ah, l’hippodrome! C’était au temps où… Bref, l’hippodrome revit – enfin !
Ce Pesage-là. C’est Charlie Delval qui nous en parle: « C’est un bâtiment qui servait à peser les jockeys, il est aujourd’hui classé. Le nom, on l’a gardé, en souvenir de cette époque où l’hippodrome faisait courir le Tout-Bruxelles. »
Cette assiette-là. « C’est un voyage avec ma mère en Espagne qui a influencé l’assiette : on voulait privilégier à la fois la bonne cuisine de chez nous et de partout – pourvu que le plat soit goûtu! –, le partage de plats multiples parce que c’est tout bonnement plus convivial et la cuisson à basse température que l’on termine à la braise, à la mode espagnole avec deux chefs venus tout droit de Grenade, Andalousia ! », s’enthousiasme Charlie Delval.
Ce soir-là. On a suivi les bons conseils de Charlie en commandant pour une tablée de deux convives, deux plats et trois accompagnements, soit le poulpe de Galice au feu de bois (que du bonheur), la pluma de cochon ibérique servie rosée (dans le cochon tout est bon, surtout le meilleur ! ), la mousseline de panais (où l’on se pâme), la purée de pommes de terre à la fourchette (plaisir régressif) et la poêlée gourmande de champignons (l’appel de la forêt). Cela étant, on aurait tout aussi bien pu découvrir la dorade de l’élevage durable de Kruishoutem ou le coquelet jaune bien de chez nous.
La cuisine se veut en effet nature (comprenez sans trop dénaturer l’aliment, que l’on achète en privilégiant « si possible » le circuit court et « si possible » le bio, précise Charlie), évolutive (au fil des saisons), généreuse (les portions sont copieuses, sans être gargantuesques), savoureuse (la cuisson basse température pour la tendresse, finie au barbecue pour la touche braisée) et fraternelle (tu goûtes mon plat, je teste le tien). De la feel-good food à déguster avec un bon flacon argentin (Maison Toby) pour un feel-good moment déridant – on reviendra !
Cette déco-là. « Au Pesage, il n’y avait ni revêtement de sol ni cave ni arrivée d’eau ni chauffage, uniquement le bâtiment classé avec ordre de ne pas toucher à l’enveloppe », nous confie Charlie Delval. Après un an de travaux, on se réjouit du clash ludique de deux univers, Lionel Jadot ayant préservé le style brut des pans de murs du Pesage d’antan pour ensuite détonner le tout en imaginant un vaste atelier où les artistes laisseraient libre cours à leur imagination. A l’arrivée : le brutalisme du lieu dialogue avec une déco foisonnante, colorée, acidulée, décomplexée en ce sens qu’elle ne ressemble à aucune autre, et où la récup’ joue le beau rôle. Ce sol composé de chutes de marbre, ces luminaires drapés de tissus colorés qui rappellent la casaque du jockey, ces étagères roses dont la verticalité défie une imposante charpente bienveillante. Ludique, récréatif, vitaminé, arty évidemment – une réussite.
Cette histoire-là …
1875.
L’hippodrome de Boitsfort voit le jour.
1900.
Le Pesage ? Le nom d’un bâtiment édifié par François Kips qui servait à peser les jockeys et leur selle. Les plus légers étant lestés afin de donner à tous les mêmes chances de gagner la course.
1995.
Adieu les courses, adieu l’hippodrome, les bâtiments se dégradent peu à peu…
2014.
Le projet Droh!me Melting Park promet de rendre à l’hippodrome son attractivité d’antan…
2016.
La Grande Tribune, la Petite Tribune et le Pesage, les trois bâtiments historiques de l’hippodrome, sont en rénovation.
20 septembre 2018.
Sans toucher au volume existant – le bâtiment a une haute valeur patrimoniale -, la Jadot Family réhabilite le Pesage en une brasserie-to-be qui privilégie la share-food. La good share-food, plus exactement.
BRASSERIE LE PESAGE
Fermé dimanche et mardi soirs, lundi toute la journée.
Chaussée de La Hulpe 51, Uccle
Parking : entrée Droh!me