La Villa Empain, un lieu unique
La Villa Empain, un lieu unique
Mots : Agnès Zamboni
Photos : DR
Imaginée par l’architecte Michel Polak, au début des années 1930, pour le baron Empain, la Villa éponyme est devenue, en 2010, sous l’égide de la Fondation Boghossian, un centre d’art et
de dialogue entre les cultures d’Orient et d’Occident. Louma Salamé, sa directrice, depuis 2016, en a fait un lieu incontournable à Bruxelles.
Peut-on dire que ce bâtiment est unique ?
Il est unique au monde. La Villa Empain est un écrin extraordinaire qui a retrouvé tout son lustre d’antan, avec sa façade soulignée à la feuille d’or. Il ne s’agit pas d’une usine devenue musée, comme beaucoup de bâtiments réaffectés. De style Art déco, véritable prouesse des années 1930, dans son architecture d’avant-garde, on ressent les prémices du Modernisme. Hors du temps, cette résidence ne ressemble à aucune autre, également pour la forme de sa piscine, la première chauffée à Bruxelles, à l’époque. Aujourd’hui, son rôle, se rapproche de celui de la Casa Arabe à Madrid, de l’Institut du Monde arabe à Paris ou de la Villa Médicis à Rome.
Peut-on parler de renaissance quant à sa rénovation ?
C’est Diane Hennebert, ma prédécesseuse, qui a suivi sa restauration, orchestrée par l’architecte et spécialiste du patrimoine Francis Metzger. Diane a ouvert le musée et en a assuré la direction pendant cinq ans. Quant aux travaux, ils ont restitué l’état d’origine, sur la base des plans et des photos d’époque conservées par la famille Empain. La maison était dans un grave état de délabrement, maculée de graffiti, avec un énorme trou au niveau du rez-de-chaussée. La restauration a duré quatre ans et a été récompensée par le prix Europa Nostra de l’Union européenne.
Transformer une villa en musée, est-ce compliqué ? Le site offre des contraintes mais aussi des qual- ités de modularité pour s’adapter aux œuvres et aux différentes thématiques. Il permet de créer des surprises dans le parcours des visiteurs. J’ai travaillé au musée Guggenheim de New York, un musée sans mur, mais aussi, pendant sept ans, au Musée du Louvre et j’ai pratiqué l’exercice dans des espaces très différents. On réaménage les salles, on joue avec les cimaises… C’est aussi l’occasion pour les artistes de créer des œuvres uniques pour habiter cet espace inspirant. A cet instar, l’installation de Daniel Buren, occupant la piscine pour l’exposition actuelle Flags, est remarquable.
Quelles nouvelles actions menez-vous ?
A mon arrivée, j’ai édité une feuille de route de sept pages dont l’une des ambitions était de diversifier la typologie des visiteurs. Je n’ai pas défait le travail de la prédécesseuse mais j’ai réfléchi à ce qui n’avait pas encore été fait. A ses débuts, la Villa Empain accueillait principalement un public féminin, venu des communes voisines. Avec mon équipe, nous avons œuvré pour augmenter le nombre de visiteurs, attirer le public néerlandophone et le milieu scolaire. La Fondation Boghossian a une responsabilité sociale et nous avons adopté le premier mercredi de chaque mois comme jour de gratuité. Nous multiplions les actions pour être ouverts à tous les publics et notamment les malentendants. Nous diversifions nos activités avec des concerts, des conférences… Nous faisons appel à des commissaires extérieurs et organisons des co-productions avec d’autres musées. Grâce à nos résidences d’artistes, nous participons à l’émergence de nouvelles œuvres. Depuis 2016, la fréquentation est exponentielle. De 10.000 visiteurs par an, elle est passée, en 2021, à 95.000 visiteurs. Cette année on a dépassé les 100. 000…
La diversification est-elle la clé du succès ?
La démultiplication des initiatives a fait de la Villa Empain, une maison ouverte. Outre cinq expositions par an, et deux présentations en simultané, tous les arts sont désor- mais présents. Nous avons été élue première destination culturelle en Belgique avec l’exposition The Light house. Nous avons battu des records de fréquentation avec cette exposition. Nous étions la première destination culturelle sur Bruxelles de MuseumPASSmusées en 2019. Mais nous avons aussi réussi à fidéliser les visiteurs qui vivent, ici, à chaque occasion, une expérience inédite. Le 14 décembre, nous inaugurons un parcours hors murs dans le bois de La Cambre. Pendant un an… des sculptures façon d’un miroir dialogueront avec le paysage et la nature..
En cours, exposition Ornamentum (collection Diane Venet), jusqu’au 14 mai 2023.
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