Henri PFR
« Aujourd’hui, les artistes électro les plus influents sont belges »
MOTS : SERVANE CALMANT
PHOTOS : JON VERHOEFT
COIFFEUR ET MAKE-UP ARTIST : LUC DEPIERREUX
Classé au Top 100 des meilleurs DJs du monde, le Bruxellois Henri PFR a l’art d’ensoleiller notre quotidien avec une électro-pop feel good. Pas étonnant que ses deux nouveaux singles, «Last Night» et «Wanna Be Loved», enfièvrent déjà le dancefloor. Pour autant, Henri ne s’est jamais pris le melon. On le rencontre à l’ING Arena, relax et loquace, avant qu’il n’entame un marathon de festivals, qui passera notamment par Tomorrowland, Les Gens d’Ere, les Fêtes de Wallonie et Ibiza …
Pour notre shooting, nous vous avons invité à l’ING Arena. Même vide, on sent que cette salle vibre… Incroyable, c’est gigantesque ! Avec plusieurs artistes belges, on devait participer à une soirée intitulée « Music for Bricks », en concertation avec Unicef, pour récolter des fonds pour l’Afrique. Le concert devait avoir lieu au Palais 12 (rebaptisé ING Arena depuis septembre 2023 – nda) mais la Covid en a malheureusement décidé autrement …
On rembobine le fil de votre vie? Vous avez commencé à mixer à 15 ans. Vous souvenez-vous du jour où le succès vous est littéralement tombé dessus? Au grand dam de mes parents, c’était lors de mon premier blocus. A cette époque, j’avais réalisé une mixtape (une compilation – nda) pour une soirée, que j’ai ensuite postée sur mon compte Youtube. Et il a exposé. Cette mixtape écoutée à la base par cent potes, a récolté 200 000 vues les premières semaines, puis 500 000. Et aujourd’hui, elle a engendré 200 millions de vues !
Comment expliquez-vous ce succès soudain et foudroyant? Avant cette mixtape, j’ai sorti un morceau par jour, pendant un an, sans jamais rencontrer le succès. Mais mon acharnement a été payant. Pas un acharnement calculé, plutôt une persévérance spontanée, innocente, sans attente même… Pour charger cette mixtape, il fallait liker ma page Facebook, qui est passée d’une poignée d’amis à 212 000 followers. Cette soudaine célébrité a changé rapidement la donne : un manager m’a repéré, un label m’a approché (Henri a signé avec Armada, le label hollandais du DJ star Armin Van Buuren – nda). Très vite, j’ai compris que je pouvais gagner ma vie en mixant. C’était surprenant et grisant à la fois. Et tout aussi rapidement, je me suis professionnalisé. Mes singles « Home » et «Until the End» ont cartonné, et les concerts se sont enchaînés. Mars 2017 (il a alors 21 ans – nda), j’ai rempli l’AB, puis j’ai participé à de nombreux festivals, dont Tomorrowland …
Vous êtes un enfant de Tomorrowland … Oui, en quelque sorte. En 2014, je faisais partie du public et j’avais parié avec un ami qu’un jour je monterais sur la Mainstage (rires) !
Vous avez même suivi Tomorrowland jusqu’au Brésil ! Tomorrowland Brasil, c’est la magie de Tomorrowland Belgique en plus «caliente». C’était également mon premier voyage au Brésil… Mais Tomorrowland Belgique continuera toujours à occuper une place particulière dans mon cœur. La plaine de Boom est mythique pour de nombreux DJs.
Au début de votre carrière, vous avez installé un studio à La Hulpe. Henri-le-Bruxellois a-t-il besoin de calme pour composer? Ce sont les meilleures et les pires années de ma courte vie (rires). Les morceaux composés à cette époque ont rencontré un véritable succès ; en revanche, je n’avais aucune hygiène de vie, j’allais dormir tard, je me levais l’après-midi, je ne faisais pas de sport … Tout le contraire de ma vie actuelle qui est véritablement structurée.
La vie d’artiste est pourtant relativement peu ordonnée… Oui, vous avez raison. Je vis d’ailleurs assez mal l’ascenseur émotionnel que me procure les passages à vide après un marathon de concerts estivaux. J’ai comme un coup de blues…
Par chance, vous avez mixé en mars dernier à Tomorrowland Winter ! Exactement, sauvé.
Avez-vous déjà pensé tout plaquer? Chaque semaine (rires) ! J’ai souvent envie de fuir, de m’isoler. J’ai parlé de ce malaise, de ces périodes sombres, récemment sur Facebook. Mais je sais aussi que les instants de bonheur reviennent toujours illuminer nos jours…
Vous semblez professionnellement épanoui. Vous opérez d’ailleurs un retour en force avec deux nouveaux singles, basés chacun sur un sample, qui cartonnent déjà … «Last Night» et «Wanna Be Loved» appartiennent désormais au public. «Wanna Be Loved», je l’ai co-signé avec le DJ lillois FDVM qui m’a appelé pour que je l’aide à terminer ce morceau. Pour ce titre, on a utilisé un sample hyper connu, issu du single « I Won’t Let You Down » du groupe britannique Ph.D, qui avait été n°1 en 1982, et qui a été ensuite samplé par le DJ Armand Van Helden sur son titre « Wings » en 2016. J’aime beaucoup l’idée du sample, car j’ai vraiment l’impression de redonner vie à des titres parfois oubliés. D’offrir à la musique l’opportunité de traverser le temps…
Vous êtes DJ, compositeur et producteur. Une préférence? DJ, avant tout, même si j’aime aussi le travail en studio. Trouver la bonne mélodie, le bon sample, le bon son, me procure un plaisir incroyable. Mais j’ai besoin de la scène pour vibrer. Quand vous avez devant vous, un public de 20 000 personnes qui sautent, vous ressentez une poussée d’adrénaline et une énergie incroyables ! Quand vient l’hiver, j’ai le blues du live …
Comment choisissez-vous l’extrait à sampler ? Je passe ma journée à écou-ter de la musique. Alors, sur Spotify, j’ai créé une playlist privée avec des idées de samples. Ce qui m’anime? Parfois une simple ligne d’accord, parfois une mélodie, ainsi mon dernier single, «Last Night», inspiré d’un tube de P Diddy. Le plus souvent, je sample des morceaux qui ont accompagné un moment de ma vie … En parallèle, je compose également des morceaux originaux.
Bientôt un album? J’y pense, mais je manque peut-être encore un peu d’assurance …
Etes-vous connu en Flandre? Oui, j’ai cette chance. Dès le début de ma carrière, mes singles ont été programmés par les radios flamandes, MNM où j’ai eu un radio show et Qmusic où j’anime toujours une émission. Ce qui m’a permis de développer une fanbase flamande.
Dans les années 80, la Belgique a été l’épicentre de la scène techno européenne. A l’évidence, c’est toujours le cas… En effet. L’électro englobe une variété de genres musicaux où, dans chaque style, les artistes actuels les plus influents sont belges ! Amélie Lens et Charlotte de Witte dans la techno, Dimitri Vegas & Like Mike dans l’électro house, Lost Frequencies dans la pop house… Il y a une véritable culture musicale électro dans notre pays. Le succès de Tomorrowland pour preuve !
Y’a-t-il une place pour chaque artiste dans ce petit pays? Oui, bien sûr. En Belgique, c’est formidable que tout le monde se connaisse et aime s’entraider.
L’intelligence artificielle, vous kiffez? C’est un outil de travail très efficace, mais pour qu’un morceau touche le cœur du public, je suis convaincu qu’il faut y mettre du vécu …
EnjoyPhoenix, votre compagne est une influenceuse. Comment gérez-vous tous les deux la célébrité? Quand quelqu’un m’accoste dans la rue, c’est souvent pour me féliciter, c’est donc toujours gratifiant. Ma compagne partage des informations qui relèvent parfois de sa vie privée, la célébrité est donc plus difficile à gérer pour elle que pour moi …
Prêt pour le marathon d’été? Absolument. Je serai notamment à Tomorrowland sur la Mainstage et à la clôture du Grand Prix de F1 à Spa-Francorchamps. Sur les scènes de France, de Suisse… Et je fais une tournée en Asie également.
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