GLENN SESTIG ou l’art du minimalisme
MOTS : BARBARA WESOLY
PHOTOS : JEAN PIERRE GABRIEL
Depuis près de 25 ans, l’architecte Glenn Sestig cultive la sobriété avec une sublime sophistication, guidée par les lignes épurées et le luxe brut. Une signature l’ayant amené à collaborer avec les plus prestigieux artistes et designers et à orchestrer la rénovation et la réalisation de galeries, villas, boutiques et buildings à l’inimitable élégance.
Qu’il s’agisse de réaménager le rez-de-chaussée du Momu d’Anvers, pour y accueillir le restaurant-boutique Renaissance, de concevoir un magasin pour Raf Simons ou de repenser l’espace de la galerie d’art privée Tuymans- Arocha, l’on retrouve une part de votre style emblématique, façonné par le design épuré et la sophistication brut. Diriez-vous que cette empreinte architecturale est le fil rouge de tous vos projets ? Cela en fait certainement partie, mais mon véritable fil rouge est de considérer le fonctionnel comme le socle de tout. Dès les premières esquisses d’un projet, je me concentre sur la manière dont il faudra se mouvoir dans l’espace et quel en sera l’usage. Mon approche est celle d’un architecte des temps classiques, à l’instar de Corbusier ou de Mies van der Rohe, pour lesquels, l’extérieur était la résultante de l’aménagement, à l’inverse du post-modernisme où l’on travaillait d’abord les formes et les volumes, obtenant un résultat design mais pas forcément pratique.
Comment sélectionnez-vous vos collaborations ? C’est un processus très intuitif et émotif. Une grande part de mes clients est liée au monde de l’art et de la mode. Deux domaines avec lesquels j’ai des affinités très fortes. L’écoute et la compréhension viscérale des besoins de chacun d’eux sont aussi essentielles à mon travail. Parvenir à correspondre aux souhaits de créateurs comme Pieter Mulier, Virginie Morobé ou Ann Demeulemeester, donner vie à leur vision est très stimulant. Certains sont encore là vingt ans après leur premier projet, tandis que j’ai collaboré vingt ou trente fois avec d’autres. Il y a un vrai lien qui se crée et je fini par mieux connaître leurs goûts et envies que les miens !
Justement, comment avez-vous pensé le design des deux flagships Morobé ? A-t-il été travaillé en partenariat avec Virginie Morobé ? Oui, toutes les réalisations se font main dans la main. Depuis l’avènement d’Instagram et Pinterest, les clients arrivent fréquemment avec un mood-board d’influences et d’images. C’était le cas pour la première boutique Morobé. On a donc traduit ces inspirations sixties et seventies en version contemporaine avec des touches organiques, du daim, des arrondis. Une fois réalisé le flagship de Knokke, nous avons transposé son essence à celui d’Anvers. C’était une autre configuration, un espace beaucoup plus grand, mais il fallait qu’il conserve le même l’ADN, celui d’un lieu magnifique sans être intimidant.
Les grands espaces sont-ils justement le luxe qui permet de laisser libre cours à l’imaginaire ? Pas forcément. Pour moi l’on peut obtenir du plus petit cadre un rendu incroyable, comme The Bakery, l’espace conçu pour le chef pâtissier et chocolatier Joost Arijs. La taille n’a pas d’emprise. Et c’est la variété des espaces, des configurations et des demandes qui fait le challenge et nous permet de ne pas tomber dans la monotonie.
Réaliser des installations temporaires comme celle du défilé des 20 ans de Verso ou de l’exposition d’Olivier Theyskens, est-il frustrant ou au contraire libérateur ? Les installations temporaires permettent une certaine légèreté. Réaliser des scénographies pour expositions ou défilés est donc très excitant. Et en parallèle à la conception architecturale classique qui prend énormément de temps, il est agréable et gratifiant d’avoir des projets courts, aux résultats plus directs.
On retrouve dans votre travail des installations monumentales mêlées à style minimaliste. Du raffinement tissé à coup de matériaux bruts. Êtes-vous attiré, exalté par les contraires ? Oui, j’aime les contrastes, ils donnent une tension. Un rendu luxueux couplé au béton et bois brut, l’équilibre entre le chaud et le froid, la sophistication et la simplicité, pour arriver à un espace chaleureux sans être ennuyeux.
Et qu’en est-il des objets, comme notamment la lignée de luminaires réalisée pour Ozone, les poignées Studio Vervloet ou les bougies parfumées Mon Dada. Sont-ils l’occasion de nouveaux défis ? Ils sont en fait soit liés à une demande, soit à un besoin que je ressens. Celui d’un objet, d’une poignée de porte, d’un robinet, qui n’existaient pas encore et que j’ai dès lors créés, en complément d’autres projets.
Depuis la création de votre cabinet d’architecte en 1999, vous n’avez eu de cesse de développer des projets toujours plus prestigieux. De quoi rêvez- vous aujourd’hui ? De réaliser un hôtel à l’étranger ou un beau musée. Ce sont deux utilisations de l’espace très fortes, deux énormes challenges, que je n’ai pas encore eu l’occasion de réaliser. Mais un jour prochain, qui sait !
www.glennsestigarchitects.com
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