Geoffroy Van Hulle
Portrait d’une audace intérieure
Mots : Barbara Wesoly
Photos : Damon De Backer
La décoration selon Geoffroy Van Hulle a tout d’une grandiose symphonie baroque. Un univers fantasque, où l’originalité s’impose avec une beauté envoûtante dans chaque espace, dévoilant des contours flamboyants dans son dernier ouvrage, Grand Interiors.
Ce livre, votre quatrième, offre une balade, à Knokke, Londres ou encore Anvers, à la découverte de résidences dont vous avez habillé l’espace. Comment avez-vous choisi les lieux présentés ? Je souhaitais que cet ouvrage dévoile des intérieurs emblématiques réalisés depuis 2018. Ces six dernières années ayant été remplies de superbes projets, j’ai finalement décidé de miser sur la diversité. J’y ai réuni modernité et classicisme, maisons de ville et appartements, vastes demeures et plus petits espaces, créant ainsi une vitrine reflétant les multiples facettes de mon style. Je l’ai complété par des textes détaillant des éléments décoratifs ou des réflexions sur mon processus créatif pour permettre aux lecteurs de plonger au cœur de ma vision.
Qu’est-ce qui fait l’essence d’un « grand intérieur » ? Une atmosphère luxueuse et chaleureuse à la fois, ce qui passe, pour moi, par une bonne dose d’éclectisme. Ma signature naît du mélange des genres : j’aime associer des antiquités à du design contemporain ou de l’art à des pièces kitch. Mais, plus encore, l’endroit doit refléter la personnalité de ses propriétaires. Un intérieur doit être le miroir d’une identité. Il n’y a rien de pire que l’impression d’habiter un musée. Heureusement, mes clients apprécient souvent une forme de fantaisie un brin dramatique et une fusion des cultures et des couleurs en harmonie avec mes envies.
Tous les espaces ont-ils le potentiel de le devenir ? Bien sûr ! Une maison doit être un voyage où l’on navigue d’une pièce en l’autre à la découverte d’endroits magistraux. L’entrée est une transition cruciale de l’extérieur vers l’intérieur, raison pour laquelle j’y accorde toujours un soin particulier. J’aime que les salons aient une ambiance feutrée, tandis qu’une cuisine ou une salle à manger doit être lumineuse et joyeuse. Lorsque chaque pièce possède son propre caractère affirmé, l’effet de surprise est fantastique.
Votre univers est tout à la fois éclatant, luxueux et théâtral. Que raconte-t-il de vous ? Un amour de la décoration sûrement inscrit dans mon ADN. Je viens d’une famille de fabricants de meubles depuis six générations. Petit, j’allais aux marchés d’antiquités avec mes grands-parents, puis ma maman a repris ce label, et aujourd’hui, nous l’avons transformé en un espace de création d’intérieurs. C’est ce que je suis et ce pour quoi je suis fait. Cela reflète aussi ma passion des voyages. A l’étranger, je commence toujours par me précipiter dans un musée ou un magasin de décoration. Et je ne peux m’empêcher de ramener des objets locaux. Ce qui, au départ, se limitait à un petit sac, puis une valise, nécessite aujourd’hui des conteneurs.
Qui sont dès lors les créatifs dont vous vous considérez d’une certaine façon l’héritier ? Je suis passionné par le design britannique des sixties et seventies. Cecil Beaton et David Hicks sont mes deux références ultimes. Le premier, par son côté théâtral, a créé des costumes pour de nombreux longs-métrages célèbres, notamment My Fair Lady. Il était également un photographe reconnu et un proche de la famille royale, qu’il a immortalisée de manière magistrale. David Hicks, quant à lui, a modernisé le style classique anglais grâce à un choix audacieux de couleurs et de textures. Ces deux figures m’inspirent au quotidien.
Qu’est-ce qui, dans un intérieur, vous attire au premier regard ? Ceux qui l’habitent. Lorsque des clients me sollicitent, je leur demande souvent de m’accompagner chez eux. J’observe leur façon de vivre et leurs comportements : s’ils se montrent accueillants ou plutôt réservés, offrent d’abord un verre ou font visiter leur maison, évoquent leurs enfants, leurs voyages ou leurs sorties. Une demeure ne doit pas simplement être belle, elle doit être en résonance avec ses occupants.
Et comment avez-vous conçu la vôtre ? Elle change deux fois par an. C’est facile puisque je vis en partie dans mon showroom. La plupart des objets présents dans mon salon sont à vendre. J’adore les belles pièces, mais je ne suis pas matérialiste. J’aime autant les voir arriver que repartir pour rendre heureux de nouveaux propriétaires. Lorsque j’achève de décorer une maison, j’y allume toujours les bougies pour qu’elles aient déjà un peu vécu. Si, trois ans plus tard, elles n’ont pas été utilisées, j’y vois un échec. Il faut qu’un lieu bouge, évolue, se transforme.
www.geoffroyvanhulle.com

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