La caméra cash
François Damiens passe derrière la caméra… et ça n’est pas triste ! Mon Ket, le premier film en tant que réalisateur de François Damiens est hautement recommandé à tous les accrocs à François l’Embrouille, ce personnage improbable qu’il crée en 2000 un peu par hasard, pour des caméras cachées.
Mots : Frédérique Morin
© FilipVanRoe/Cinéart
Mais gageons que le succès ira bien au-delà ! Et que suivront tous ceux qui à l’instar de Katell Quillévéré (la réalisatrice qui a dirigé François Damiens dans Suzanne) voient en lui un comédien de l’envergure de grands acteurs comme Jean Yanne ou Guy Marchand.
Précisons tout de même que Mon Ket, n’est pas une énième aventure de François l’Embrouille, cet olibrius que l’on adore détester, mais il y a à l’évidence un lien de parenté avec ce personnage de Dany dans lequel s’est glissé François Damiens himself.
Mon Ket est donc l’histoire de ce Dany, un malfrat en cavale prêt à tout pour reprendre sa place de père auprès de Sullivan, son fils de 15 ans. Son parcours sera émaillé de rencontres qui sont autant de caméras cachées où de parfaits inconnus ont joué leur propre rôle face à un personnage tout aussi vulgaire et incontrôlable que son illustre cousin…
Par une belle journée de printemps, dans les jardins de l’Hôtel Manos 1er à Bruxelles, nous sommes allés à la rencontre de l’acteur/réalisateur François Damiens qui nous en dit plus sur ce personnage et sur ce lm pour le moins atypiques…
Comment est née l’histoire de Mon Ket ?
Avec Benoît Mariage (NDLR : le coscénariste du film), nous avons d’abord imaginé le personnage de Dany, puis la vie qu’il avait. Ensuite, nous avons essayé de raconter ça à travers une succession de scènes de la vie de tous les jours.
Comment s’est dessiné ce personnage de Dany que vous interprétez ?
L’idée générale du film c’est ce personnage, ce qu’il est : un type sans foi ni loi, sans aucun filtre. J’ai trouvé intéressant de le confronter à un enfant… et que l’on se demande comment un type qui a si peu de « manières » élève un enfant. Je voulais montrer le rapport copain, copain qui ne fonctionne pas entre un père et son fils, montrer des gens qui recomposent des familles en 3 jours…
Tout odieux et vulgaire qu’il soit, vous réussissez à le rendre touchant…
On sent que ce type est complètement fracturé. D’ailleurs c’est pour ça que les gens sont si gentils avec moi. En temps normal, on ne s’approcherait pas trop d’un type qui est en cavale… on espérerait juste qu’il se fasse vite coincer !
Il n’y a rien de plus touchant (et terriblement triste !) qu’un père qui en croyant bien faire, élève mal son enfant.
Vous reprenez l’idée de la caméra cachée qui marque vos premiers pas comme acteur. Pourquoi ce choix de faire des gens que vous piégez, les protagonistes de votre film ?
Ce qui m’intéressait c’était de mélanger la réalité à une fiction. Et il n’y a pas meilleur acteur que quelqu’un qui ne sait pas qu’il joue. Mon souhait était de filmer les émotions des gens au plus près, leurs réactions face à un personnage à qui je faisais dire (pour mon plus grand plaisir !) tout ce que je voulais, filmer les expressions des visages… car là tout est dit !
La démarche était-elle très différente de vos caméras cachées façon François l’Embrouille ?
C’est complètement différent dans la mesure où pour la télévision je faisais venir les gens que je piégeais… là c’est moi qui me suis déplacé chez les gens.
D’autre part, pour chaque caméra cachée et tout au long du film, je tiens toujours le même personnage, un personnage qui devait s’inscrire dans l’histoire. Je tenais donc à tourner chronologiquement et à monter en parallèle afin d’avoir un fil conducteur et que chaque piégé ait un rapport avec celui qui le précédait. Le danger était de faire un assemblage de caméras cachées… ce qui n’avait aucun intérêt !
J’ai compté 22 personnes piégées, sans compter celles que l’on découvre lors du générique de fin. Mon Ket en chiffre, ça donne quoi ?
On a piégé 12 personnes par jour et le tournage a duré 40 jours. À l’arrivée, on avait 650 heures d’images qu’il fallait ramener à 1h30. Ce fut un an et demi de tournage et 3 ans d’écriture avec Benoît MARIAGE.
Impossible d’improviser sur ces caméras cachées… certaines d’entre elles ont mis 8 mois à se monter !
Mon Ket se passe pour l’essentiel en Belgique. Pourquoi cet aparté africain à la fin de votre film ?
Je n’avais pas envie de me limiter à la Belgique. Mon personnage est un type sans limites et j’aimais bien l’idée qu’il doive, à un moment, foutre le camp. Et puis j’ai toujours rêvé d’aller faire des caméras cachées en Afrique. Depuis le temps que j’en fais, j’ai remarqué que chaque fois qu’il y a un Africain, on le garde au montage ! Les Africains sont marrants, ils ont un truc que l’on n’a pas.
Dans le même ordre d’idée, il aurait été impossible de tourner ce lm en France. On n’aurait pas eu toute cette bonhomie, cette générosité, cette humanité que l’on a en Belgique…
Mon Ket, en salle depuis le 30 mai !
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