Edouard Vermeulen
« Ce livre, je le dédie à la passion »
Mots : Barbara Wesoly
Photos : DR
Après une exposition emblématique à l’espace Vanderborght de Bruxelles, Natan offre un dernier chapitre flamboyant à ses célébrations du 40e anniversaire de la Maison, avec son ouvrage « Edouard ». Un recueil d’archives, autant qu’un objet d’art et d’élégance, au diapason des créations de son fondateur.
Photos des coulisses et des défilés, croquis, archives de campagnes et de fabrication. Ce livre est tout à la fois un mélange d’esthétique et d’émotion. A l’image de Natan ? Oui, il était essentiel pour moi qu’il incarne l’ADN de la Maison. On m’avait déjà proposé de le réaliser à l’occasion de notre trentième anniversaire, mais je trouvais alors la démarche trop prétentieuse. Dix ans plus tard, j’estime que s’il faut laisser une trace, c’est maintenant. Mais avec une démarche artistique et une véritable vision. Les clichés ne suivent pas un ordre chronologique et l’on n’y trouve pas d’interminable biographie. Ce n’est pas une rétrospective des décennies écoulées, plutôt un ouvrage avec une âme, porteur d’histoire par l’image. Un bel objet avec pour fil rouge l’amour de la mode et du vêtement, qui anime Natan.
« Edouard Vermeulen c’est Natan et Natan c’est Edouard Vermeulen », affirme le designer d’intérieur Jean-Philippe Demeyer dans cet ouvrage. Il s’intitule d’ailleurs simplement “Edouard ». Souhaitiez-vous l’aborder à la manière d’un journal intime ? Il est surtout le reflet de ce qu’a été ma vie et de ces quarante dernières années que je n’ai pas vu passer. La passion a été le moteur de mon existence et elle m’a habité du premier instant à aujourd’hui. Elle est au cœur de ce livre.
Vous l’évoquez comme “le document d’une vie”. Représente-t-il aussi une forme de passage à la postérité pour la Maison ? C’est une forme d’accomplissement, c’est certain, mais qui ne s’inscrit pas dans l’immobilité. Il est la preuve tangible que le vêtement couture européen, et belge de surcroît, doit exister et a toute sa raison d’être. Et il a été également conçu pour être une représentation de notre travail et de notre définition du vêtement – dans son essence contemporaine, élégante et minimaliste – notamment à l’étranger. Il s’achève sur les photos du défilé Natan Couture, réalisé à l’Hôtel de Salm de Paris pour nos quarante ans, car elles évoquent à merveille la philosophie de célébration qui nous est si chère, mais cela n’empêche pas cet ouvrage d’être profondément intemporel et non pas restreint par une ligne du temps. Cela lui permettra d’être toujours aussi actuel et inspirant dans une ou plusieurs décennies.
Une photo de celui-ci vous émeut-elle particulièrement ? Celle en compagnie de la reine Paola et qui s’accompagne d’un petit mot de sa main, sur la longue histoire qui l’unit à Natan. Sa présence au premier défilé de la Maison, en 1986, a été un point de départ marquant et reste, à mes yeux, intimement lié au début de mon métier.
Avez-vous le sentiment qu’il dévoile des facettes de l’univers de la Maison, jusqu’ici méconnues du public ? On y découvre en tout cas l’envers du décor de nos ateliers tout comme une part des détails de mon intérieur, de mon dressing. Proposer une expérience et permettre la compréhension de ce savoir-faire reste essentiel à mes yeux. Nous avons d’ailleurs transformé l’étage de notre siège historique de l’avenue Louise afin que l’espace d’essayage s’ouvre sur les salles de confection de nos créations couture, pour un moment d’autant plus immersif.
En en reparcourant les pages, quel regard portez-vous sur ces quatre décennies ? Je suis avant tout frappé par l’évolution de la mode, ces changements d’usage et de société au niveau vestimentaire. La disparition des barrières générationnelles notamment, qui a bouleversé les codes et nous a amenés à repenser à maintes reprises nos créations et les silhouettes de celles-ci. Sans parler de l’influence omniprésente d’internet et des réseaux. Quand je songe par exemple au fait que Balenciaga était le créateur m’ayant le plus inspiré en matière de haute couture et qu’aujourd’hui, la griffe est connue par la nouvelle génération pour ses modèles de sneakers, je me dis que cette constante évolution a un aspect fascinant.
Et si vous deviez en écrire le prochain chapitre, à quoi ressemblerait-il ? Fin décembre s’achèvera la célébration de ce quarantième anniversaire. L’occasion d’un nouveau départ, même si l’on conservera l’énergie créative qu’on y avait insufflée. J’aime cette dynamique de retour à une page blanche, de remise à zéro deux fois par an. En janvier nous dévoilerons la collection printemps-été 2024 à la résidence de l’ambassadeur de Belgique, à Paris. Et nous avons aussi l’objectif de repousser toujours plus les frontières et pourquoi pas, d’ouvrir une boutique à Madrid, une ville dont l’atmosphère, comme Munich ou Zurich, rencontre l’ADN de la Maison. Et continuer d’écrire en beauté l’histoire de Natan.
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