Denis Van Weynbergh
« Nous sommes qualifiés avec les 40 meilleures équipes au monde ! »
Mots : Servane Calmant
Photos : Adrien Nivet
Dimanche 10 novembre, Denis Van Weynbergh quittera le port des Sables- d’Olonne sur l’IMOCA D’Ieteren Group pour s’élancer dans un tour du monde à la voile, en solitaire, sans escale et sans assistance. Le skipper brabançon est bien déterminé à parcourir les 45 000 kilomètres autour du globe et devenir ainsi le premier Belge à boucler cette course mythique. L’histoire d’un rêve qui devient peu à peu réalité…
Denis Van Weynbergh a débuté comme moniteur de voile et de croisière à l’UCPA, tout en collaborant en tant que journaliste nautique pour Yachting Sud, revue francophone belge spécialisée. Et très vite, la « compétition » va le titiller… Transat Jacques Vabre, Bermudes 1000 races, Vendée Arctique, toutes ces courses prestigieuses sont à son palmarès. Le Vendée Globe ? Son entourage lui répond qu’il est fou d’en rêver. Mais Denis aime les défis. Le premier est de taille : dénicher un budget. Tenace, le skipper belge devient l’ambassadeur du nouveau programme de mécénat de la société familiale belge D’Ieteren Group. Dès 2021, il se lance dans le circuit IMOCA pour engranger de l’expérience et des milles, afin de valider sa participation au Vendée Globe. Le rêve devient peu à peu réalité…
Le 10 mai, vous avez rallié Lorient à New York et validé votre ticket pour le Vendée Globe 2024. Cette qualification, c’est déjà une victoire ! Le Vendée Globe, c’est un vaste projet en plusieurs étapes. Cette qualification est certes déjà un aboutissement. Toute l’équipe et moi-même en sommes fiers. Mais cette première victoire ne revêt de sens que si nous terminons la course…
Lors de la dernière édition du Vendée Globe, en 2020, vous aviez dû renoncer à ce challenge faute de moyens financiers. Qu’apprend-on de ce genre d’échec ? En 2020, je n’étais pas aussi performant qu’aujourd’hui, je relativise donc ce revers. Et cet échec m’a appris à être tenace, à ne jamais renoncer à mes rêves et à ne pas commettre deux fois la même erreur. J’ai donc repensé et retravaillé complètement le projet que j’avais proposé en 2020. Le nouveau dossier parle davantage de valeurs, de victoires, de missions, de sens, que d’argent. Il met l’accent sur ce que je pensais être des points faibles et qui se sont révélés notre force : le bénévolat de l’équipe, le collaboratif et l’associatif en matière de management, le circuit court, le recyclage du matériel lié à notre petit budget, les années de sacrifices et d’efforts consentis pour monter ce projet à terme… C’est ce modèle de gestion, couplé à l’histoire d’une véritable aventure humaine, sportive et technologique, qui a séduit notre partenaire belge, D’Ieteren Group.
Ils seront 40 skippers à concourir à cette compétition, dont treize sur bateaux neufs, ce qui n’est pas votre cas … Choisir un bateau d’occasion fait triplement sens. En termes de budget d’abord, ensuite, je souhaitais un bateau fiable (un voilier monocoque de la classe Imoca, long de 60 pieds – nda) qui avait déjà fait le Vendée Globe, enfin, acheter un bateau d’occasion pour le réemployer, le réparer, allonger sa durée de vie et favoriser l’économie circulaire, correspond pile-poil à notre philosophie.
Un skipper belge, un mécène belge, un IMOCA qui bat pavillon belge. Cocorico ! Nous avons démarché des partenaires en France et en Belgique, mais avoir un partenaire familial belge comme D’Ieteren Group, c’est évidemment une grande satisfaction. Des responsabilités aussi, mais avant tout une immense fierté.
Dépression météorologique ou coup de blues : que redoutez-vous le plus en mer ? La casse mécanique et l’abandon de la course sont la hantise de chaque marin. Quant aux aléas de la météo, ils vont tester ma résilience, c’est à moi de m’adapter. A moi aussi de bien choisir ma route, pour éviter les zones sans vent ou avec trop de turbulences. Cela fait 25 ans que je navigue, j’ai 15 Transatlantiques à mon actif, j’ai donc l’habitude de gérer la solitude en mer pendant 10 voire 20 jours. Mais durant le Vendée Globe, il me faudra affronter des conditions de mer extrêmes pendant presque 3 mois … J’ai un préparateur mental et je vais discu-ter avec les copains qui ont participé au Vendée Globe pour récolter leurs impressions et leurs bons conseils. Et durant le périple, je pense séquencer l’aventure en plusieurs étapes pour avancer mentalement.
Le peu de temps libre que vous aurez, comment le gérerez-vous ? Je vais lire, regarder des films. S’offrir des moments de récréation, des bulles d’oxygènes, est absolument nécessaire pour garder le moral …
Prendre le large, ça vous apporte quoi ? C’est la question à 1000 euros ! Même ma psy n’a pas réussi à m’aider à formu-ler une réponse à cette question (rires). Mais je vais vous répondre : c’est un luxe de pouvoir naviguer pendant trois mois. C’est comme si on vous donnait la possibilité de skier pendant 3 mois sans discontinuité, sur une piste sans fin !
Le Vendée Globe, cette course mythique, elle vous trotte en tête depuis combien de temps ? J’en parle autour de moi depuis 15 ans … Mais en Belgique, on me répondait, « c’est impossible », « tu es fou, tu n’auras jamais de bateau ni de budget »… Et pourquoi ce projet ne serait-il pas réalisable ? On a une équipe de hockey sur gazon, les Red Lions, qui a remporté l’Euro, la Coupe du monde, les JO ! Je suis joueur de hockey et leur réussite me parle énormément, mieux, elle m’a galvanisé. Il faut stopper la pensée limitante, briser ce « plafond de verre » à la belge, qui constitue un obstacle, un frein, à la réussite ! En Belgique, on manque souvent d’ambition, et je dis ça avec humilité, sans vouloir la ramener…
Denis, vous êtes donc un homme passionné, ambitieux. Un peu fou aussi ? Oui, il faut un peu de folie pour monter pareil projet. Et une ambition saine, en effet. Pour le Vendée Glove, nous sommes qualifiés avec les 40 meilleures équipes au monde. Il faut le dire, sans fanfaronner, mais le dire quand même.
Le Vendée Globe, c’est le défi d’une vie. Si vous devenez le premier Belge à boucler ce tour du monde, quel challenge voudrez-vous encore relever ? Dans quatre ans, on remet ça, et on peut espérer le gagner ! (rires)
Abonnez-vous dès aujourd’hui pour recevoir quatre numéros par an à votre porte
Vous aimerez peut-être
Stéphane Rutté – Talent passionné derrière un club mythique
La rénovation du club David Lloyd à Uccle est achevée, consolidant sa position de club familial…
Sarah Bovy – Le sacre de la passion
Le parcours de Sarah Bovy a le parfum des victoires conquises par la témérité.
Vincent Vanasch – Le gardien de but des Red Lions a la niaque
Les Red Lions se sont qualifiés pour les Jeux olympiques de Paris 2024. Vincent Vanasch, leur…