Barbara Abel sublime les ténèbres
Barbara Abel sublime les ténèbres
Barbara Abel sublime les ténèbres
MOTS : BARBARA WESOLY
PHOTO : MELANIA AVANZATO
Il est des livres qui nous transportent, vers des ailleurs lointains ou aux confins de nous-mêmes. Tout comme il est des auteurs qui captent les peurs primales et les dérives humaines, avec une justesse à part. C’est le cas de Barbara Abel, qui au fil de ses romans comme sous sa nouvelle casquette de scénariste télévisuelle, raconte avec magnétisme, les êtres au bord de l’abîme.
L’on vous surnomme « la Reine du Polar belge », un titre acquis au fil de l’écriture de 14 thrillers aussi palpitants que percutants. Qu’est-ce qui vous attire irrémédiablement vers ces intrigues psychologiques ? Le thriller domestique est un rappel de ce plaisir enfantin de se faire peur. Comme lorsque petit, on se poussait jusqu’à l’excitation du frisson. J’écris aussi les histoires que j’aimerais qu’on me raconte. Celles de personnes ordinaires, avec lesquelles d’emblée peut se créer une forme d’identification, plutôt que de super flics ou de héros surpuissants. Et dont une part du contexte fait écho à ce que je vis alors. Mon premier livre “L’instinct Maternel”, avait pour héroïne une femme enceinte, tandis que je l’étais moi-même. Les années passant, les enfants des familles que j’évoque ont grandi, jusqu’à devenir des adolescents.
Vos personnages sont souvent abîmés, torturés, parfois vénéneux, comme dans “Les Fêlures”, votre dernier roman. Fréquemment étouffés par un environnement familial toxique. Pourquoi ces thèmes trouvent-ils résonnance en vous ? La famille est un microcosme dans lequel chaque émotion est exacerbée, devient explosive. Ce qui touche aux liens du sang est d’emblée viscéral. Et ces situations se passent d’explications car tout le monde les comprend. Quant à mes personnages, mon but est d’amener le lecteur à s’imaginer pouvoir basculer comme eux vers l’obscurité, pour peu d’être mis face à la même réalité.
Deux de vos ouvrages ont été adaptés à l’écran. “Un bel âge pour mourir”, via un téléfilm baptisé “Miroir, mon beau miroir”. Et “Derrière la haine”, pour le cinéma cette fois, avec “Duelles”. Est-ce un défi que de voir quelqu’un d’autre s’approprier ses personnages ? Lorsque j’achève un livre, je le lâche étrangement avec assez de facilité et ne ressens pas d’inquiétude à le voir adapté. Mon roman est déjà là, tangible, personne ne peut le modifier, le magnifier ou l’abimer. Et le fait d’avoir adoré aussi bien le téléfilm de Serge Meynard que le long-métrage d’Olivier Masset-Depasse, m’amène au contraire à ressentir une grande fierté.
Une adaptation américaine de “Derrière la Haine” baptisée “Mother’s Instinct”, arrivera également cet été sur nos écrans. Avez-vous pu vous rendre sur le tournage ? Oui, pour les trois adaptations. Se retrouver entourée de tous ces techniciens, acteurs, figurants, dans ces décors immenses, et me dire qu’ils sont là parce qu’un jour j’ai imaginé une histoire, toute seule chez moi, c’est fort. Mais quand en plus il s’agit de Jessica Chastain et Anne Hathaway, c’est surréaliste !
Vous avez également co-écrit la série “Attraction”, “Prix de la meilleure fiction francophone étrangère au festival de la fiction à La Rochelle” qui sera diffusée ce printemps avec la scénariste française Sophia Perié. Cette écriture à quatre mains était-elle complexe ? Je ne devais au départ qu’écrire un concept de projet, mais il a été accepté par la RTBF et Catherine Burniaux de De Mensen m’a proposé de m’occuper du scénario. Mais ce n’est pas mon métier, je n’en connais pas les impératifs et codes. Elle m’a donc adjoint Sophia Perié qui elle est scénariste et incroyablement douée pour la structure et la narration. Je ne me verrais travailler avec personne d’autre. Il ne s’agissait pas que de développer un script. Nous avons aussi passé des heures à parler de nous, de nos influences, de ce qui nous touche. Il faut une vraie osmose et Sophia et moi formons un parfait tandem. Cela a été une aventure extraordinaire et l’est toujours puisque nous travaillons actuellement sur la saison deux !
L’écriture scénaristique vous porte-t-elle autant que celle d’un roman ? Ce sont deux processus totalement différents, aussi bien dans la rédaction que dans l’émotion qu’ils procurent. L’écriture scénaristique en duo est plus légère, ludique. Sophia dirige parfois les personnages vers lieux que je n’aurais pas imaginés et vice versa. C’est un échange d’arguments, un débat. Je me permettrais des audaces dans un livre qui ne sont pas forcément envisageables pour ce type de format. Et puis dans un scénario, il ne s’agit pas de nuances de style, mais de raconter les faits, de manière brute. Lorsque je conçois un roman, je n’ai pas non plus la contrainte d’une équipe de production à consulter. Mais ce luxe d’être seul maitre à bord, signifie aussi affronter les blocages en solitaire. Je pratique au final les deux exercices simultanément. La rédaction de la saison 1 nous a pris trois ans, et il était inconcevable de ne pas écrire de roman durant un aussi long laps de temps. Nous avons entamé la saison 2 il y a un an, et je suis en parallèle en pleine création d’un nouveau roman
Attraction, à découvrir sur la RTBF à partir d’avril et en mai sur TF1.
Myriam Leroy nous interpelle : Pourquoi a-t-elle été silenciée ? Parce qu’elle était femme ?
Myriam Leroy nous interpelle : Pourquoi a-t-elle été silenciée ?
Parce qu’elle était femme ?
Myriam Leroy nous interpelle : Pourquoi a-t-elle été silenciée ?
Parce qu’elle était femme ?
Mots : Servane Calmant
Photo : Anthony Dehez
Coiffeur et Make-up artist : Luc Depierreux
Dans son nouveau roman au titre intriguant, « Le Mystère de la femme sans tête », Myriam Leroy ressuscite Marina Chafroff, résistante bruxelloise d’origine russe, décapitée à la hache à 33 ans durant l’Occupation, et grande oubliée de l’Histoire. Par là même, la romancière prend la défense de toutes les femmes humiliées, réduites au silence, reléguées à l’arrière-plan. Rencontre à la KBR à Bruxelles avec une autrice, combattante d’un autre type certes, qui lutte au quotidien contre les stéréotypes de genre, la misogynie et le sexisme.
Nous avons interviewé une première fois Myriam Leroy à la sortie d’« Ariane », le récit d’une relation siamoise entre deux ados du Béwé. C’était en 2018. En 2019, parait « Les Yeux rouges » où elle dépeint la mécanique glaçante du harcèlement en ligne. Avec « ADN », en 2022, création du Théâtre de la Toison d’Or (TTO), elle évoque sa propre histoire, celle d’une fille née d’un donneur de sperme anonyme. Février 2023, à la faveur de la sortie de son nouveau roman, « Le Mystère de la femme sans tête », on recontacte Myriam pour un long entretien et un shooting-cover. Elle accepte, ravie. Youpi ! On commençait à avoir le temps long…
Nous nous rencontrons à la KBR, la Bibiothèque Royale de Belgique qui conserve et gère quelque sept millions de documents. Ce lieu, Myriam, c’est vous qui nous l’avez suggéré. Pourquoi ? L’écriture de mon nouveau roman m’a amenée plusieurs fois à fréquenter la salle de lecture de la KBR, ainsi que les Archives de la Ville de Bruxelles. Le passé, la guerre, m’ont toujours paru abstraits. Mais peu à peu, au rythme de mes recherches journalistiques, en enquêtant sur Marina Chafroff, cette femme décapitée pendant l’Occupation, ce passé s’est matérialisé. D’une image fixe, celle de sa tombe au cimetière d’Ixelles, je découvrais graduellement un film animé… Je me suis prise de passion pour la KBR, le site physique, cet imposant bâtiment moderniste, et son site en ligne, qui est devenu une véritable obsession. Je rêve d’un nouveau projet qui m’oblige à nouveau à fréquenter la KBR avec assiduité.
L’écriture du « Mystère de la femme sans tête » a nécessité un travail journalistique et d’historienne… Oui, mais d’historienne avec un regard profane (rire). Les historiens ont des méthodes plus orthodoxes et professionnelles que les miennes, mais j’assume et revendique complètement les libertés prises avec le réel. Cela étant, c’est en effet la première fois que je me documente autant pour un roman. L’écriture de la pièce « ADN» avait nécessité des recherches mais sur un thème, la procréation médicalement assistée, plus contemporain, qui ne me demandait pas de compulser des tonnes d’archives. « Le Mystère de la femme sans tête », en revanche, c’est plus de deux ans de travail …
Marina Chafroff, jeune Russe exilée en Belgique, fut, sur ordre de Hitler, décapitée à la hache en 1942, pour avoir poignardé à Bruxelles un officier allemand. Il n’y a pourtant ni rue ni monument à son nom. Qu’elle soit née femme a-t-il encouragé cet oubli ? Quand j’ai découvert la tombe de Marina Chafroff au cimetière d’Ixelles avec ce mot : décapitée, j’y ai vu deux anomalies. Une femme. Décapitée. Après la Seconde Guerre mondiale, le centre du cimetière d’Ixelles fut aménagé en « Reposoir des Martyrs » destiné aux victimes de la terreur nazie. C’est là que gît Marina, seule femme parmi tous les hommes, parmi Lucien, Raymond, Maurice, Gaston… Je débute donc mes recherches sur Marina Chafroff et je découvre que les résistantes sont les grandes oubliées de l’histoire des années 40-45. Beaucoup d’entre elles ont été réduites au silence, mises à l’écart, en raison d’une misogynie ambiante. On disait des femmes qu’elles étaient trop bavardes, qu’on ne pouvait pas leur confier de secrets. Qu’elles étaient influencées par leurs hormones, donc instables.
Ce constat de l’humiliation faite aux femmes, vous l’aviez déjà dénoncé dans votre film documentaire, « #salepute », co-réalisé avec Florence Hainaut, qui traite de la cyberviolence. Oui. Sans minimiser le rôle des femmes dans la Résitance, force est de constater qu’elles étaient principalement appelées pour taper du courrier ou soigner les blessés.
Pourquoi ? Par misogynie.
Des femmes résistantes souvent oubliées de l’Histoire… Oui, car l’Histoire est souvent écrite par des hommes, parce que les femmes n’ont pas entretenu leur propre souvenir, qu’elles ne pratiquent pas la mémoire autoglorifiante comme les hommes et qu’à l’époque, on leur a souvent dénié toute charge politique à leurs exploits.
C’est le cas de votre héroïne… Tout à fait, le parti communiste belge n’a jamais invoqué en sa faveur l’exploit de Marina Chafroff. Pire : il s’en est publiquement désolidarisé en niant l’acte de résistance pour invoquer un crime mû par une pulsion suici-daire. Quelle humiliation ! Ce roman repose d’ailleurs sur une question qui m’a taraudée tout le long de son écriture : pourquoi le nom de Marina Chafroff, mère de famille au courage extraordinaire, résistante décapitée, est-il inconnu ? Pourquoi n’a-t-elle pas marqué l’Histoire ? Comment a-t-elle été refoulée de nos mémoires ? Pourquoi a-t-elle été silenciée ?
A cette enquête, vous venez amarrer un autre récit, aux résonnances intimes. Le « tu » qui se faufile entre les pages du roman, c’est vous, Myriam… Par le truchement de coïncidences, les deux personnages vont en effet se confondre, les récits se tresser, même si je ne m’autoproclame pas résistante, je vous rassure. Mais les tourments de Marina, ce sont les miens. Sa révolte, aussi. Je me suis donc invitée dans le récit car je conti-nue à m’insurger contre notre société qui pousse les femmes à ne pas l’ouvrir, à ne pas s’engager… Le point commun entre les femmes, le seul peut-être, c’est qu’on les traite comme des femmes. Toutes les humiliations qu’elles ressentent se ressemblent, or la société a tendance à les morceler. Le « ça n’arrive qu’à toi », je n’y crois pas. Le combat est collectif et politique.
Il existe, écrivez-vous, « un lien d’humiliation unissant toutes les femmes ». Les femmes sont-elles trop gentilles ? Evidemment. On fait ce qu’on attend de nous. On se conforme au modèle qui nous préexiste.
Rien ne change ? Si. Les femmes se sont émancipées. Et cette émancipation ne plait pas à tout le monde : la haine et le mépris qui leur sont voués s’avèrent encore plus présents aujourd’hui qu’hier. La misogynie a flambé.
La solution ? Je n’en ai pas. Peut-être faudrait-il que les femmes ne se sentent plus obligées d’évoluer sous le regard des hommes et que le couple hétérosexuel ne soit plus considéré comme l’accomplissement d’une vie…
Vous évoquez également dans ce roman les fake news et la désinformation… Ces fausses nouvelles étaient endémiques, déjà à l’époque, bien avant les réseaux sociaux, et visaient évidemment à manipuler l’opinion publique.
Quel est votre public ? Depuis que j’ai été identifiée comme féministe, j’ai surtout un lectorat de femmes. Je fais peur aux hommes. Rire.
Cette étiquette vous ennuie-t-elle ? Non. Etre féministe dans notre société, c’est une évidence ! En revanche, je ne suis pas une spécialiste du féminisme. Mon combat, je le mène contre le sexisme. Des éléments du réel et mon vécu me fournissant la matière nécessaire pour alimenter mon combat et mon écriture.
Entre 2012 et 2017, vous avez fait l’objet d’un véritable harcèlement sur internet et sur les réseaux. En décembre dernier, l’auteur a été condamné à 10 mois de prison avec sursis probatoire… Depuis, le prévenu a décidé de faire appel. Le procès aura lieu en 2024. S’il le perd, il a déjà déclaré qu’il irait en cassation et si nécessaire, devant la Cour européenne des droits de l’homme. Le procès a été cruel et violent. Il constituera peut-être la matière d’un prochain roman.
2023 sera-t-elle une année chargée ? J’assure la promo de mon nouveau roman, une reprise de la pièce « ADN » est prévue au TTO, j’adapte en scénario de long métrage « Cherche l’amour », ma première pièce jouée également au TTO et j’écris une série documentaire sur le quotidien des enseignantes pour la RTBF. Je lis. Beaucoup. Et chaque jour, je promène Caramel, mon chien.
« Le mystère de la femme sans tête »
Extrait : Il y a une femme, enterrée au cimetière d’Ixelles, qui a été décapitée à la hache en 1942. Son nom est russe. Elle était toute petite et avait une grâce de pirate. Les Russes qui s’en souviennent prétendent qu’elle a changé le cours de la guerre. Les Belges, eux, ne disent rien. Ils l’ont oubliée.
Elle l’a dit : Que je rassure le lecteur, lire « Le mystère de la femme sans tête » ne nécessite pas un gros effort de projection dans le passé. Ce n’est absolument pas un récit de guerre, mais un roman moderne.
Editions Seuil
La Villa Empain
La Villa Empain, un lieu unique
La Villa Empain, un lieu unique
Mots : Agnès Zamboni
Photos : DR
Imaginée par l’architecte Michel Polak, au début des années 1930, pour le baron Empain, la Villa éponyme est devenue, en 2010, sous l’égide de la Fondation Boghossian, un centre d’art et
de dialogue entre les cultures d’Orient et d’Occident. Louma Salamé, sa directrice, depuis 2016, en a fait un lieu incontournable à Bruxelles.
Peut-on dire que ce bâtiment est unique ?
Il est unique au monde. La Villa Empain est un écrin extraordinaire qui a retrouvé tout son lustre d’antan, avec sa façade soulignée à la feuille d’or. Il ne s’agit pas d’une usine devenue musée, comme beaucoup de bâtiments réaffectés. De style Art déco, véritable prouesse des années 1930, dans son architecture d’avant-garde, on ressent les prémices du Modernisme. Hors du temps, cette résidence ne ressemble à aucune autre, également pour la forme de sa piscine, la première chauffée à Bruxelles, à l’époque. Aujourd’hui, son rôle, se rapproche de celui de la Casa Arabe à Madrid, de l’Institut du Monde arabe à Paris ou de la Villa Médicis à Rome.
Peut-on parler de renaissance quant à sa rénovation ?
C’est Diane Hennebert, ma prédécesseuse, qui a suivi sa restauration, orchestrée par l’architecte et spécialiste du patrimoine Francis Metzger. Diane a ouvert le musée et en a assuré la direction pendant cinq ans. Quant aux travaux, ils ont restitué l’état d’origine, sur la base des plans et des photos d’époque conservées par la famille Empain. La maison était dans un grave état de délabrement, maculée de graffiti, avec un énorme trou au niveau du rez-de-chaussée. La restauration a duré quatre ans et a été récompensée par le prix Europa Nostra de l’Union européenne.
Transformer une villa en musée, est-ce compliqué ? Le site offre des contraintes mais aussi des qual- ités de modularité pour s’adapter aux œuvres et aux différentes thématiques. Il permet de créer des surprises dans le parcours des visiteurs. J’ai travaillé au musée Guggenheim de New York, un musée sans mur, mais aussi, pendant sept ans, au Musée du Louvre et j’ai pratiqué l’exercice dans des espaces très différents. On réaménage les salles, on joue avec les cimaises… C’est aussi l’occasion pour les artistes de créer des œuvres uniques pour habiter cet espace inspirant. A cet instar, l’installation de Daniel Buren, occupant la piscine pour l’exposition actuelle Flags, est remarquable.
Quelles nouvelles actions menez-vous ?
A mon arrivée, j’ai édité une feuille de route de sept pages dont l’une des ambitions était de diversifier la typologie des visiteurs. Je n’ai pas défait le travail de la prédécesseuse mais j’ai réfléchi à ce qui n’avait pas encore été fait. A ses débuts, la Villa Empain accueillait principalement un public féminin, venu des communes voisines. Avec mon équipe, nous avons œuvré pour augmenter le nombre de visiteurs, attirer le public néerlandophone et le milieu scolaire. La Fondation Boghossian a une responsabilité sociale et nous avons adopté le premier mercredi de chaque mois comme jour de gratuité. Nous multiplions les actions pour être ouverts à tous les publics et notamment les malentendants. Nous diversifions nos activités avec des concerts, des conférences… Nous faisons appel à des commissaires extérieurs et organisons des co-productions avec d’autres musées. Grâce à nos résidences d’artistes, nous participons à l’émergence de nouvelles œuvres. Depuis 2016, la fréquentation est exponentielle. De 10.000 visiteurs par an, elle est passée, en 2021, à 95.000 visiteurs. Cette année on a dépassé les 100. 000…
La diversification est-elle la clé du succès ?
La démultiplication des initiatives a fait de la Villa Empain, une maison ouverte. Outre cinq expositions par an, et deux présentations en simultané, tous les arts sont désor- mais présents. Nous avons été élue première destination culturelle en Belgique avec l’exposition The Light house. Nous avons battu des records de fréquentation avec cette exposition. Nous étions la première destination culturelle sur Bruxelles de MuseumPASSmusées en 2019. Mais nous avons aussi réussi à fidéliser les visiteurs qui vivent, ici, à chaque occasion, une expérience inédite. Le 14 décembre, nous inaugurons un parcours hors murs dans le bois de La Cambre. Pendant un an… des sculptures façon d’un miroir dialogueront avec le paysage et la nature..
En cours, exposition Ornamentum (collection Diane Venet), jusqu’au 14 mai 2023.
Baudelaire mis à nu
Baudelaire mis à nu
MOTS : SERVANE CALMANT
PHOTO : LAURENCE ERLICH
Le Bruxellois Bernard Yslaire, star de la BD, auteur de la saga culte « Sambre » et d’un somptueux roman graphique, « Mademoiselle Baudelaire », illustre les mythiques « Fleurs du mal » du poète maudit, dans un beau livre à la flamboyante noirceur. Rencontre.
Décidément, Yslaire rime avec Baudelaire. Comment expliquez-vous cet attachement ? J’ai toujours aimé la poésie. Ado, j’écrivais des poèmes à mes petites amies… Baudelaire, c’est une lecture de jeunesse mais j’ai eu envie d’en savoir plus sur cet écrivain majeur du 19e siècle. J’ai alors découvert un dandy cynique, fasciné par les bas-fonds, accro à l’alcool et à l’opium, prisonnier du spleen, atteint par la syphilis, qui a nourri une vision tragique de l’homme, a dilapidé l’héritage de son père et a fini sous tutelle. Et je me suis interrogé : comment ce petit monsieur (par la taille) apparemment antipathique, voire détestable même, a-t-il été capable d’écrire ces fabuleux poèmes qui ont bercé mon adolescence ?
Pour répondre à votre questionnement, vous avez d’abord exploré la vie du poète à travers le regard de sa muse (la BD « Mademoiselle Baudelaire ») et ensuite illustré « Les Fleurs du mal ». Mais sans filtre cette fois … A tout vous avouer, je n’aurais jamais osé illustrer « Les Fleurs du mal » sans avoir au préalable écrit et dessiné « Mademoiselle Baudelaire », que je considère comme une véritable biographie de Charles Baudelaire, largement documentée et sourcée. J’ai fait de nombreuses recherches pour comprendre sa relation avec sa mère, mais aussi pour représenter la bohème artistique dont il faisait partie aux côtés du poète Gérard de Nerval et du photographe Nadar et, évidemment, pour illustrer sa relation avec sa muse créole, cette Vénus noire qu’il a aimée et maudite et à propos de laquelle on sait peu de choses si ce n’est qu’elle a présidé à l’inspiration des « Fleurs du mal ». Le seul élément inventé, qui rythme le récit de « Mademoiselle Baudelaire » étant la lettre imaginaire écrite par Jeanne Duval qu’elle adresse à la mère de Charles. Pour illustrer « Les Fleurs du mal », ma démarche a été radicalement différente. Je me suis en effet rapproché de Baudelaire sans filtre, en l’abordant frontalement à travers son œuvre majeure. Lecture après lecture, j’ai décodé les poèmes des « Fleurs du mal » comme une biographie sincère et intime de Baudelaire par lui-même. J’ai en quelque sorte désacralisé ses poèmes en entrant dans son intimité, dans sa folle histoire d’amour pour Jeanne Duval. « Les Fleurs du mal », c’est le livre d’un cœur mis à nu.
Mais comment illustrer les 100 poèmes au plus près de cette mise à nu ? Baudelaire, fils d’un peintre qui n’est jamais passé à la postérité, était un poète fasciné par les images, il se ruinera d’ailleurs en achetant des tableaux. J’ai alors interrogé les métaphores et allusions de Baudelaire et j’ai compris que sa poésie était un patchwork d’images. Les clés de lecture de ses poèmes ont alors guidé tout naturellement mes dessins.
Vous teniez absolument à illustrer l’édition originale, celle de 1857, à l’époque censurée et amputée de six poèmes … Absolument. Baudelaire souhaitait que son livre ne soit pas un album mais qu’il connaisse « un commencement et une fin ». En 1857, il publie une première édition des « Fleurs du mal » constituée de 100 poèmes. Condamné pour offense à la morale publique et aux bonnes mœurs, il doit retrancher six poèmes. La seconde édition sera enrichie de nouveaux poèmes, mais l’ordre des chapitres n’est plus le même et ne correspond donc probablement pas à la volonté exprimée par Baudelaire. Or comme je désirais comprendre la matière du recueil tout en conservant ce fil rouge, il me fallait illustrer la toute première édition.
Des mots crus, des vers sulfureux, des dessins … à aucun moment, je n’ai voulu faire de beaux dessins, mais bien des illustrations qui sont autant de clés de compréhension des poèmes. Pour illustrer le diable ou des prostituées, j’ai plongé dans de la documentation d’époque, dans la chair du siècle. Le 19e voit la naissance de la photo, de la pornographie également. On montre le sexe de manière frontale, on n’idéalise plus la femme nue. Toutes mes recher-
ches sur le 19e ont nourri mes dessins.
Les poèmes des « Fleurs du mal » auraient-ils été censurés s’ils avaient été rédigés aujourd’hui ? Oui. Baudelaire continue à choquer. Ce qu’il a écrit c’est ce qu’il ne pouvait pas vivre à l’époque. Son amour pour la Venus noire était scandaleux. Lisez à haute voix le poème « Une charogne » devant une assemblée, vous verrez les réactions.
La série « Sambre » a pour cadre historique le 19e, Baudelaire est un auteur majeur du 19e, êtes-vous un spécialiste du 19e parisien ? Non, c’est le fruit du hasard. En revanche, je suis un passionné d’Histoire. Et le Paris du 19e est proba-
blement la ville la plus riche en documents d’archives bien utiles à mes recherches.
On vous a très rapidement catalogué auteur romantique. Cette étiquette, forcément restrictive, vous convient-elle ? L’image que les gens ont de vous ne peut évidemment pas vous résumer. Je ne renie pas cette image d’auteur romantique, je l’assume même. Davantage aujourd’hui qu’en début de carrière où à travers la série de bande dessinée « Bidouille et Violette », on m’avait taxé de romantique fleur bleue. A tort. Car cette BD racontait la poésie du coin de la rue, sans héroïsme aucun, contrairement à « Sambre » et son romantisme exacerbé. Comme quoi, il faut toujours se méfier des étiquettes.
Tomorrowland Winter - La musique électro unit le monde
Tomorrowland Winter
La musique électro unit le monde
Mots : Yves Merens
Photos : Tomorrowland
Pour la troisième fois, Tomorrowland prend ses quartiers d’hiver à l’Alpe d’Huez. Entre flocons et freeride, les festivaliers de nombreux pays vont vibrer aux sons des DJ sets électroniques. Mais savent-ils que cette machine à bonheur est belge ?
Tomorrowland, c’est l’un des plus grands moments de partage de musique électronique au monde. Les chiffres donnent le tournis. En 15 ans, la version historique de ce festival, et celle de l’été, est passée de 10.000 personnes à 600.000 festivaliers, tous venus près d’Anvers, en juillet 2022. Une machine à tubes belgo-belge qui ravit les visiteurs de plus de 200 pays.
Des frères très discrets
Ce sont deux frères, Manu et Michiels Beers qui ont lancé le concept de base à Boon sans cesser de le faire grandir. Aujourd’hui, presque 100 personnes forment l’équipe, toute l’année. Leur dernière trouvaille, c’est Tomorrowland Winter, la version alpine du festival. Mélange de messages d’unité mondiale et de décors fantastiques, cette expérience mettra à nouveau le feu à l’Alpe d’Huez, du 18 au 24 mars prochains.
Pendant le festival, la station française respire et danse électro. La journée, le ski se mêle aux concerts. Le cocktail est bluffant, détonnant. Sortir du téléphérique du Pic Blanc, à 3.300 mètres d’altitude, et tomber nez à nez avec une scène dansante est inoubliable.
Juste le temps de rechausser les planches après la dance, et quelques pistes plus bas, les choses prennent de l’ampleur. A flan de pentes, les scènes se gonflent de milliers de clubbeurs en bottines de ski. « Welcome to Tomrrowland Winter » scande le DJ fraîchement arrivé par les airs, en parapentes. Les drapeaux de nations présentes s’agitent avec frénésie aux pieds de l’énorme statue en neige, taillée pour l’occasion. Jusqu’à 18h, les mixes des meilleurs du monde s’enchaînent.
Le soir, un monde féérique s’anime
Le temps de se changer, vient l’après ski que l’on peut passer dans le village festif construit par les organisateurs à l’Alpe d’Huez. On y boit des bières belges évidemment, mais pas que. La multitude d’échoppes impressionne. Il faut dire que Tomorrowland, c’est une organisation sans faille. Ici, pas d’attente, pas de file, seule règne une ambiance bon enfant avant les concerts du soir. Le grand palais des sports de la station, transformé pour l’occasion en temple du show électro, transporte dans un autre monde, irréel ! Avec danseurs descendants du plafond, scène géante, jeux de lumière somptueux. Tiens, ça tombe bien ce soir, il y a Lost Frequencies qui joue, un autre belge au sommet de son art.
Sur le trajet du retour, on peut encore se plonger dans l’ambiance grâce à la radio de Tomorow, la fameuse « One World Radio », tout en se demandant si l’on vient de rêver ou si tout cela est bien réel. On se pince encore des semaines plus tard. Tomorrowland a placé le made in Belgium au centre du monde électronique.
Daan, le retour Enfin !
Daan, le retour
Enfin !
Daan, le retour
Enfin !
Mots : Servane Calmant
Photo : Jimmy Kets
Daan, crooner flamand solitaire et un brin philosophe, plante le décor d’une nouvelle aventure musicale. Rock indé, électro dance, beats entrainants, facture vintage, « Ride » séduit par son énergie décuplée et son optimisme exaltant.
6 ans après « Nada » et 10 ans après « Le franc belge », vous revoilà enfin. Il a été long ce silence… « Disparaître, c’est un luxe que je me suis offert, pour pouvoir revenir quand le besoin se ferait sentir. Et il s’est pointé ce besoin il y a deux ans, mais la Covid en a décidé autrement … J’aime l’idée du retour pour surprendre à nouveau, c’est excitant. Et ce temps, je ne l’ai pas gaspillé, je l’ai mis à profit pour questionner l’écriture, la musique, le sens de la vie.
Et vous avez trouvé des réponses ? Non, et heureusement ! Je n’ai que 53 ans, j’espère trouver des réponses à mon questionnement à 80 ans. Plus sérieusement, j’ai découvert à quel point j’avais besoin de composer de la musique et de la partager avec un public.
Vous me parlez de thérapie là ! Exactement. Comme tous les grands timides, je m’extériorise sur scène. Quand je reçois des amis chez moi, je suis calme, je parle bas. Daan Stuyven ne pousse jamais la voix, sauf en live quand il est Daan. Jeune, j’ai constaté que j’étais le contraire de l’image que j’envoyais sur scène. Composer à la maison, j’adore ; mais monter sur scène pour le timide que je suis, c’est un tour de force. Alors, soit j’arrêtais soit j’allais à la recherche de ce que je n’étais pas. J’ai continué l’aventure, parce que c’était la décision la plus excitante à prendre. Aujourd’hui, avec « Ride », je me suis offert un disque entrainant, positif, qui va me faire du bien en live, qui m’incite à me lâcher physiquement. Il me fallait un disque bourré d’énergie, je l’ai fait.
« Western », le 1er single tiré de votre nouvel album, est un fabuleux instrumental. C’est quand même audacieux pour un chanteur de délivrer un… instrumental ! (Rire). J’aime (me) surprendre et jouer avec l’attente du public, l’intriguer. « Western » est une première plage que j’aime beaucoup et qui est censée préparer mon public au reste de l’album, car il renferme en lui, la mélancolie et l’excitation dont j’ai imprégné les autres titres.
Deuxième single, « High ». Pensez-vous qu’il y a quelque chose pour nous là-haut ? « High », c’est une invitation à s’assumer, à oser être soi. Dans la vie, on est souvent confronté à faire un choix entre deux directions, soit on descend soit on monte, soit on s’apitoie sur son sort soit on reste constructif et optimiste. Mais je ne juge pas les autres, « whatever gets you whatever gets you high » est assez nuancé…
« Ride » est un mixe remarquable de rock indé, d’électro dance, de country, ponctué de banjo, de vieux synthés, d’une boite à rythmes Casio… Qu’écoute Daan, quand il se lève le matin ? Le chant des oiseaux. (silence) J’écoute également « The Ink Spots », un groupe vocal des années 30 qui n’a strictement rien à voir avec ce que je fais, alors il ne m’intimide pas (héhé). « Randy Newman », le matin, me convient bien également. Et des groupes des années 70, pourvu que le son soit chaud. Et souvent, je l’avoue : j’aime la voix des hommes matures.
Daan, ce crooner… Oui, j’ai beaucoup de respect pour l’âge qui permet à certaines personnes d’être plus savantes et poétiques. Je suis content d’avoir pu assister à un concert d’Aznavour, avant qu’il ne s’éteigne.
Etes-vous passéiste ? Quel joli mot. Je suis un brin nostalgique probablement. J’habite une ferme bicentenaire qui me survivra. Mais, à la réflexion, j’aime davantage l’intemporalité des choses que je ne suis nostalgique.
On vous sait spectateur du monde, que voit Daan-philosophe quand il regarde l’époque actuelle ? Tout qui interroge ce monde m’intéresse et m’intrigue. Mais je ne suis pas un philosophe, je suis un simpliste, quelqu’un qui simplifie le message, je fais du « pop art » revendiqué, avec le risque évidemment d’écorner la vérité, mais toujours avec la volonté d’éviter d’être prétentieux et arrogant.
S’il vous fallait résumer « Ride » en une phrase ? J’ai utilisé la tension dramatique qui nourrit mon écriture musicale dans un contexte positif. Transposer le mal de vivre en optimisme. C’est plus facile à 23 ans qu’à 53, mais j’y suis arrivé. La preuve que vieillir n’est pas un naufrage, pour peu que l’on conserve l’appétit, le désir, dans le regard.
Album « Ride », sorti le 11 novembre dernier, chez PIAS
www.daan.be
Les rendez-vous de Tania Garbarski
Les rendez-vous de Tania Garbarski
Mots : Servane Calmant
Photos : Pamela Berkovic
En 2023, Tania Garbarski sera à l’affiche de « Mamma Mia ! », la version belge francophone de la comédie musicale inspirée par les chansons d’ABBA, et sur les planches du Théâtre Le Public, avec son binôme de mari, Charlie Dupont, dans « En attendant Bojangles », adapté du best-seller éponyme d’Olivier Bourdeaut. Année chargée pour une comédienne qui a réussi à asseoir sa notoriété sur le travail, sans jamais perdre le nord : « il faudrait parler davantage des artistes belges, et pas uniquement quand ils ont réussi en France ! »
« Mamma Mia ! », véritable jukebox musical, se jouera à Forest National à partir du 20 janvier prochain. A l’occasion de cette comédie musicale feel-good, vous chantez en français le répertoire d’Abba… Il s’agit d’une franchise. La version en français a été jouée il y a une dizaine d’années au Théâtre Mogador à Paris. Le livret des chansons en français donc, a alors été validé par Benny Andersson d’Abba. Au niveau du casting belge francophone, je donne la réplique à Isabelle de Hertogh. Nous sommes sur scène les deux meilleures amies de l’héroïne…
Etes-vous fan d’Abba ? Abba fait partie de notre culture populaire et je ne peux m’empêcher de danser sur leurs tubes quand je les entends à la radio. J’ai vu le spectacle « Mamma Mia ! » à Paris, à Londres, et toute la salle était debout et dansait. Cette liesse, je l’ai ressentie également lors des répétitions à Anvers… Et, au-delà de la musique, j’aime les thèmes que charrie « Mamma Mia ! » : la femme libérée, la mère célibataire, l’enfant qui quitte le nid, la quête pour retrouver le père inconnu… C’est un beau portrait de femme au service d’une feel-good comédie, touchante et émouvante.
Jouer, danser, chanter, « Mamma Mia ! », c’est un spectacle physique. Pendant les répétitions à Anvers, j’ai eu plus d’une fois l’impression d’être une petite fille qui jouait dans « Fame ». Pour le rôle de Tanya, avec y, je viens de passer trois semaines avec des danseurs professionnels et un orchestre, pour travailler la danse et le chant. « Mamma Mia ! », c’est une opportunité magnifique que je ne pouvais décemment pas refuser.
Vous aviez déjà goûté à la comédie musicale ? Oh oui ! En sortant des études à l’INSAS, j’ai enchaîné « L’Opéra de quat’sous », « Les Misérables » à Anvers, « Emilie Jolie » au Cirque royal. La comédie musicale requiert une grande hygiène de vie pour préserver sa voix ; jeune, je n’étais pas prête à autant de sacrifices. Je chante juste, mais je suis une comédienne qui aime chanter, pas une chanteuse.
Tanya, votre personnage dans « Mamma Mia ! » est une cougar pétillante un brin fofolle. Etes-vous née pour la comédie ? Non, j’étais plutôt prédisposée à des pièces classiques. Si la vie m’a amenée ces dernières années, à accepter plus de comédies que de drames, c’est probablement dû à mon union avec un certain Charlie Dupont (son mari à la ville, nda) qui a réveillé le clown qui sommeillait en moi. Dans « Le Canard à l’orange » de William Douglas Home, que nous reprendrons au Théâtre Le Public en 2023, le texte plein d’esprit et de drôlerie provoque de grands éclats de rire. Il y a quelque chose de libérateur à faire rire les gens comme à les émouvoir.
Si Charlie Dupont a réveillé le clown qui sommeillait en vous, qu’avez-vous titillé en lui ? Je pense lui avoir apporté de la rigueur dans le travail.
Vous êtes mariée à Charlie Dupont depuis 22 ans. Comment faites-vous pour préserver l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle ? Nous n’avons pas de recette miracle. Nous sommes très différents dans notre approche du métier et complémentaires à la fois. Au début de nos carrières respectives, personne n’imaginait nous voir sur les planches ensemble !
Quel a été le déclic ? Depuis « Promenade de santé » de Nicolas Bedos où nous sommes tous deux sur scène et « Tuyauterie » que Philippe Blasband a écrit pour moi et Charlie, j’ai l’impression qu’on nous engage ensemble. Ainsi en 2021, le Théâtre de Liège en co-production avec le Théâtre national de Nice a fait appel à nous pour la trilogie « Les Aventures de Zelinda et Lindoro » de Carlo Goldoni…
Hakim Benbouchta - feel good
Hakim Benbouchta
Feel Good
Hakim Benbouchta
Feel GoodMots : Ariane Dufourny
Photo : Didier Vandenbosch
Après 30 ans de carrière dans la pub, Hakim Benbouchta a tourné la page. Pour en ouvrir une nouvelle. Durant le confinement, il a écrit « Le Pseudo » inspiré par Line, sa fille de 14 ans. Le succès fut tel que ce roman sera prochainement adapté en téléfilm et diffusé à Noël en 2023. Loin de se reposer sur ses lauriers, l’auteur lasnois nous livre aujourd’hui « Le plus beau cadeau ». Un bonbon à lire !
« Le plus beau cadeau », l’histoire d’un père qui n’a pas vu son fils grandir et qui souhaite rattraper le temps perdu. Vous avez perdu le vôtre précocement à vos 16 ans. Un roman en hommage à votre père ? C’est une façon d’idéaliser les retrouvailles dont j’ai toujours rêvé, sachant qu’elles n’arriveraient jamais. Si mon père débarquait de nulle part, je voudrais vivre tous ces moments qui m’ont été « volé ».
En 2020, vous encaissiez deux nouvelles effrayantes. Une pandémie mondiale et votre licenciement. Deux ans plus tard, vous avez sorti deux romans à succès. Vous avez l’art de rebondir ? (Rire). Il m’a fallu un peu de temps pour relativiser ces deux coups durs. Mais aujourd’hui, je suis bien plus heureux que je ne l’étais dans ma banque. J’ai découvert un univers dans lequel je ne me débrouille pas trop mal et qui me plaît. C’est devenu un hobby comme si je jouais au golf toute la journée.
30 ans de pub. Deux romans en deux ans. Et vous venez de rejoindre la prestigieuse agence artistique UBBA, basée à Paris, en tant qu’auteur-scénariste. Votre vie, c’est Walt Disney ? J’écris un premier bouquin qui est édité, c’est déjà fantastique ! Il est dans les librairies, génial. Puis sur un coup de tête, j’en fais un scénario qui va devenir le téléfilm de Noël 2023 de deux grandes chaînes nationales européennes, incroyable. UBBA est l’agence de Gilles Lellouche, Guillaume Canet, Dany Boon, Florence Foresti… Et je les rejoins, c’est un miracle !
« Le Pseudo », « Le plus beau cadeau », deux romans « feel good » à souhait. Votre ambition est-elle de redonner le sourire aux gens à travers la lecture ? Je ne dois pas réfléchir ou me torturer pour écrire et générer des émotions plutôt positives ou parfois un peu tristes, mais jamais dramatiques. Je ne m’imagine pas écrire un thriller, je préfère les dialogues un peu humoristiques. Parfois, je souris comme si l’on me les dictait et j’ai les yeux humides.
Harold, Ingrid, Rachid, Delsart… On retrouve dans vos romans les prénoms et noms de personnes qui vous entourent depuis toujours. Vous cultivez le culte de l’amitié et de l’amour ? Les prénoms et noms de mes personnages sont autant de clins d’oeil positifs à ma femme, ma famille, mes potes qui sont les mêmes depuis 40 ans. Harold était un ami très proche qui souffrait du cancer et s’est suicidé. C’est un hommage que je lui rends dans mes deux livres et dans le scénario que je suis en train d’écrire.
Deux romans en deux ans et déjà un nouveau scéna-rio ! Plus rapide que le rythme d’Amélie Nothomb ? Les deux premiers livres que j’ai écrits, je les ai adoptés en scénario. « Le Pseudo » est en tournage avec dans les rôles principaux, Lannick Gautry et Hélène de Fougerolles. J’ai déjà rencontré des producteurs pour « Le plus beau cadeau ». Le troisième, qui est prêt, a été écrit comme un scénario truffé de dialogues jubilatoires, qui m’amusent bien plus que de longues descriptions. Je compte bien l’adapter en livre dès à présent.
Un indice sur votre prochain roman ? Une comédie intergénérationnelle, une grand-mère et sa petite-fille. La première vit un amour platonique avec son voisin de palier qu’elle rêve d’épouser. A l’inverse, la seconde vit dans l’ère du temps LGBTQIA+ et papillonne. Son aïeule va lui demander de la coacher.
Votre plume est dédiée aux relations humaines ? J’aime les histoires de relations humaines qui sont universelles et permettent à chacun de se retrouver dans une histoire. J’ai appris à lire avec Pagnol. Un homme qui a perdu sa femme, « La Femme du boulanger ». Un père qui a perdu sa fille, « La Fille du puisatier », plus d’eau dans la colline, ou encore « Manon des sources ».
Comme vos Harold, vous affectionnez le Coca Light et les chemises blanches. Le dernier « Harold » est un philanthrope. Un reflet de votre personnalité qui n’hésite pas à verser un pourcentage de ses ventes à « Aquarelle », une ASBL venant en aide aux femmes enceintes en situation de grande précarité ? J’ai toujours eu le sentiment d’avoir beaucoup de chance et de devoir la rendre. C’était aussi le cas de ma mère, de ma grand-mère. Quand on a beaucoup reçu gracieusement sans l’avoir vraiment mérité, à part d’être né, c’est la moindre des choses.
Écrire un roman, beaucoup d’entre nous en rêvent. Quels sont vos conseils ? Faites-en un hobby et au lieu de jouer au padel ou au golf, mettez dans votre agenda deux heures pour écrire. Ne vous mettez pas de pression, avancez petit à petit mais faites-le !
Angelo Bison - ce regard qui tue
Angelo Bison
Ce regard qui tue
Mots : Servane Calmant
Photos : Anthony Dehez
La troisième et ultime saison de la série belge francophone « Ennemi Public » devrait à nouveau faire un carton d’audience. Le mérite en revient notamment à Angelo Bison, homme de théâtre depuis 40 ans, qui a accepté d’endosser le rôle phare de Guy Béranger, assassin d’enfants. Rencontre avec un acteur prévenant, dont le regard noir perçant a pourtant glacé des millions de téléspectateurs.
Alors que les deux premières saisons d’ « Ennemi public » ont débarqué sur Netflix, nous rencontrons Angelo Bison à la villa Empain pour le shooting de notre couverture. «Mais Angelo, où sont passés vos cheveux mi-longs ? ». De toute évidence, dans la dernière et ultime saison de la série belge qui sortira sur nos petits écrans au printemps prochain, Guy Béranger change de tête. Pour dévoiler la véritable nature de ses démons? On espère arracher à Angelo Bison d’autres confidences que capillaires… Patience.
Les téléspectateurs belges vous ont découvert à la faveur d’ « Ennemi Public », mais les amateurs de théâtre vous connaissent depuis belle lurette ! 42 ans, un bail. J’ai décidé, c’est un scoop, de mettre fin à ma carrière théâtrale. J’ai dit ce que j’avais à dire. Le théâtre m’a comblé, il m’a nourri au sens propre et figuré. Il m’a fait vivre et m’a élevé. Gagner sa vie en s’amusant, c’est un sacré privilège. Après avoir joué une centaine de pièces, j’ai eu l’impression ces dernières années que j’étais au bout du chemin. Il est temps d’en prendre un autre. Et cette découverte de l’image, de la caméra, me plaît beaucoup.
C’est la télé qui est venue à vous ? Avant « Ennemi public », je n’avais accepté que quelques petits rôles anecdotiques au cinéma. Deux jeunes réalisateurs, Matthieu Frances et Gary Seghers, m’ont proposé non pas de rejoindre un casting mais de tourner un pilote d’une série belge. Matthieu m’avait vu au Rideau de Bruxelles dans « Fabbrica » de Pietro Pizzuti (pour lequel Angelo Bison a reçu le prix « Meilleur seul en scène », nda) et souhaitait m’offrir « un rôle à ma mesure », m’avait-il gentiment écrit. Ce pilote de « Ennemi public » a convaincu le service production de la RTBF qui a donné son accord pour la saison 1. Pour la petite anecdote : j’ai ensuite rejoué une petite scène pour voir si j’étais capable de tenir le rôle. Comme quoi, malgré 40 ans sur les planches, rien n’est jamais acquis. Et je trouve ça normal et pro, car si le personnage de Béranger n’avait pas tenu la route, la série n’aurait pas rencontré le succès qu’elle a connu. Sur le plan personnel, j’ai apprécié cette nécessité de me remettre sans cesse en question. La seule manière d’avancer.
Béranger, vous le côtoyez depuis 2016, date de diffusion de la saison 1. A croire que vous aimez les fêlés… Je vis avec lui depuis 8 ans, si on prend en compte le pilote de la série. Et, au théâtre, j’en ai côtoyé des fêlés, en effet ! Dans « L’avenir dure longtemps », j’ai endossé le rôle de Louis Althusser, ce philosophe français qui a étranglé sa femme. J’aime les personnages tordus car il me ramène à la complexité de l’être humain et m’oblige à étudier des comportements qui sortent de la sphère rationnelle et sont probablement animés par des pulsions qui engendrent une dépendance. S’agissant de Guy Béranger, la motivation principale de ses meurtres est basée sur la satisfaction qu’il ressent à les commettre. De quel ordre est cette sensation, cette pulsion, je n’en sais rien. Une certitude : il doit tuer encore pour retrouver le vertige de cette sensation.
Qu’arrive-t-il à Guy Béranger dans cette ultime saison ? Je ne peux évidemment rien dévoiler, si ce n’est qu’on va enfin savoir si Chloé Muller (Stéphanie Blanchoud, nda) va retrouver sa sœur Jessica. Par ailleurs, à la fin de la saison 2, Béranger change de modus operandi et tue un adulte. Dans la saison 3, on entre dans la tête de ce personnage extrêmement déroutant et assez complexe pour susciter l’intérêt du téléspectateur pour cette 3e saison.
Béranger intrigue car il suscite à la fois le malaise et une certaine empathie… Exactement. Béranger n’a pas abusé des enfants qu’il tue, ce qui ne le rend pas moins dangereux et méprisable. Mais il ne s’agissait pas pour autant de camper un monstre, mais de me mettre dans la peau d’un être humain, pour lequel on puisse éventuellement ressentir une certaine empathie. Le festival Séries Mania m’a décerné le prix du « Meilleur acteur » pour ma performance dans « Ennemi public.» A cette occasion, la directrice du festival m’a fait un cadeau en me disant : « Béranger est un psychopathe, pourtant on n’arrive pas à lui en vouloir pour le mal qu’il a causé ! ». A ce moment-là, j’ai su que j’avais rempli ma mission.
C’est-à-dire ? J’ai réussi à offrir aux réalisateurs la matière qu’ils souhaitaient. Et j’en suis heureux.
Dans un entretien récent pour Be Perfect, Stéphanie Blanchoud (l’inspecteur Muller), formée comme vous au théâtre, m’avouait que la série « Ennemi public » lui avait apporté une notoriété nécessaire. Avez-vous ce même sentiment ? Oui. Au théâtre, j’étais (re)connu certes, mais de 500 voire 1000 amoureux de la scène, guère plus. Après la diffusion de la première saison d’ « Ennemi public », on me reconnaissait dans les rues de Bruxelles et on me demandait de poser pour un selfie plusieurs fois par jour ! Toujours en me complimentant, jamais pour critiquer le choix du rôle de Béranger. J’aime beaucoup ces moments d’échanges avec le public.
Vous avez été comédien et metteur en scène. Vous aimez l’image, dites-vous. Dois-je comprendre que la réalisation vous tente ? Oh non. Très sincèrement, ce qui m’a poussé à accepter « Ennemi public », c’est la volonté de faire plaisir. J’aime cette notion de « donner du plaisir » par le jeu, sur des planches ou devant l’œilleton de la caméra. De surcroit, je déteste le pouvoir. Diriger une équipe, non. Je veux être un serviteur pas un directeur. Même participer à un festival qui juge et récompense l’une ou l’autre prestation, non merci, très peu pour moi.
Avec quel réalisateur belge rêveriez-vous de tourner ? Je vais vous décevoir, mais aucun en particulier et tous à la fois. En revanche, je suis très exigeant sur le texte, je veux des histoires bien écrites. Mon prof de théâtre me disait : il faut qu’une pièce rende le public plus intelligent. C’est vrai aussi pour le cinéma.
Au cinéma où vous venez de donner la réplique à Vincent Macaigne… Sur le tournage en effet de « Bonnard, Pierre et Marthe » du talentueux Martin Provost (réalisateur e.a. de « Séraphine »), avec Vincent Macaigne, un homme charmant qui campe le peintre aux côtés de Cécile de France, sa compagne Marthe. Ce biopic sortira en 2023.
Angelo Bison, êtes-vous un sexagénaire heureux ? Oh oui, je pourrais mourir demain sans regret aucun. Jeune, je m’ennuyais à l’école, le théâtre m’a permis de trouver ma voie. Je lui ai donné 42 ans de ma vie. Mais il m’a sauvé. A partir du moment où vous êtes sauvé, vous ressentez uniquement de la reconnaissance. Que demander de plus ?
De l’amour ? Je l’ai trouvé également. J’ai été père sur le tard car le théâtre est exigeant et chronophage… Aujourd’hui, j’ai une épouse magnifique et je suis père de deux enfants formidables, Léonie 6 ans et Jules 9 ans. Je les conduis à l’école, je cuisine comme un vrai Italien (sourire), je fais du sport, je me promène dans les bois près de chez moi à Gerpinnes, je fais même le ménage (rire). Et j’attends un bon scénario qui viendra ou pas.
« Ennemi public », le dénouement
Librement inspiré d’un sujet on ne peut plus sensible chez nous, la libération conditionnelle de Michelle Martin, complice de Dutroux, « Ennemi Public » raconte l’histoire de Guy Béranger (Angelo Bison), ex-tueur d’enfants qui, au terme de sa peine de prison, demande à être accueilli à l’abbaye de Vielsart en Ardenne belge.
Lors de la saison 3, on sait déjà que Chloé, la jeune inspectrice de la police fédérale, va continuer à chercher sa petite sœur, alors que Béranger persévère dans son rôle de « moine parfait ». Mais, poussé par ses pulsions, il profitera de chaque instant pour se rendre au cœur du village et y repérer qui, parmi les enfants, sera sa prochaine victime. Frère Lucas pourra-t-il éviter le drame ?
Les saisons 1 et 2 sont disponibles sur Netflix. La saison 3 (6×60’), qui clôture la série, sera diffusée sur La Une/RTBF au printemps 2023.
Stéphanie Blanchoud - « Ennemi public m’a apporté une notoriété nécessaire »
Stéphanie Blanchoud
« Ennemi public m’a apporté une notoriété nécessaire »
Mots : Servane Calmant
Photo : Vincent Calmel
Elle incarne l’inspectrice Chloé Muller dans « Ennemi public » dont la saison 3, la dernière, sera diffusée sur La Une /RTBF début 2023. Elle est également à l’affiche du film « La Ligne » d’Ursula Meier, a signé un duo avec Benjamin Biolay et nous fixe prochainement rendez-vous au Rideau de Bruxelles. Stéphanie Blanchoud, Bruxelloise d’origine belgo-suisse, a le vent en poupe. Comment le vit-elle ? On lui a posé la question.
Comédienne, actrice, auteure, musicienne, chanteuse, vous êtes sur tous les fronts, êtes-vous une touche-à-tout voire une hyperactive ? Oh, non. Je suis d’abord comédienne, j’ai ensuite écrit pour moi et pour mes amis du Conservatoire, car j’estime que l’écriture et le jeu sont intimement liés. La musique est venue après et me complète. Mais j’ai senti les dix premières années de ma vie professionnelle que ces différentes casquettes brouillaient la perception des professionnels du secteur. Comment devaient-ils m’identifier ? Comme actrice ou chanteuse ? Je me suis un peu rebellée contre cette attitude. Comment voulez-vous vivre uniquement de la musique ou du jeu en Belgique ? En Angleterre, de nombreux artistes sont pluridisciplinaires ; on accepte enfin cette démarche chez nous, mais il a fallu du temps…
Si, je dis bien si vous deviez choisir une seule voie artistique, quelle serait-elle ? Jouer. Pour la grande liberté et l’aspect ludique que me procure le jeu.
Vos débuts sur scène, c’est au théâtre. Votre notoriété en revanche, vous la devez à la TV. Chloé Muller (la série « Ennemi public ») a-t-elle changé votre vie ? Non, mais cette série m’a beaucoup appris, notamment à tenir un personnage sur la durée. Elle m’a également apporté une sorte de légitimité. Il n’y a rien de pire pour un acteur que les périodes vides, creuses. L’écriture pour le théâtre, la musique, le cinéma, me permettent de les combler ces creux, mais « Ennemi public » m’a apporté une notoriété nécessaire. Grâce à la série, on ‘m’identifie’ plus facilement.
C’est difficile de se faire une place au soleil en Belgique francophone ? Oui, faire sa place et la tenir aussi.
Le comédien belge Philippe Jeusette, un autre personnage central de la série « Ennemi public », est décédé le 26 août dernier, quel est le plus beau souvenir qu’il vous a laissé ? Je connaissais Philippe bien avant « Ennemi public ». Je lui avais notamment écrit un rôle dans la pièce « Jackson Bay » mise en scène au Théâtre Jean Vilar à Bruxelles. Philippe, c’était un corps, une présence. Il a marqué tous les gens qu’il a côtoyés. Pour moi, il était avant tout un ami d’une grande fidélité.
Vous êtes à l’affiche de « La Ligne » d’Ursula Meier (en salle en janvier 2023) aux côtés notamment de Benjamin Biolay. Dans ce film, vous êtes condamnée à ne plus approcher la maison familiale pour avoir agressé votre mère. J’ai coécrit le scénario avec Ursula Meier. Le personnage principal est une femme violente, pas un homme, non, une femme. La violence féminine est un sujet peu abordé au cinéma.
Benjamin Biolay joue également dans « La Ligne ». Dans ce film, il est musicien ; vous êtes chanteuse. L’occasion d’un duo musical qui devrait sortir également début 2023… Exactement. Il a composé un extrait musical pour le film, qu’il a souhaité développer. Il m’a invitée à le rejoindre en studio d’enregistrement. Notre duo sortira tout prochainement. J’espère d’ailleurs, à l’occasion de ce film, pouvoir toucher le public français !
Car vous êtes également chanteuse. « Ritournelle », votre 5e album est sorti en septembre 2021. Sur les ondes radiophoniques et même dans nos salles de concert, vous êtes pourtant relativement discrète… Ce n’est pas du tout un choix. C’est la réalité d’une artiste qui chante en français en Belgique ! J’étais aux Nuits botanique en mai dernier et en première partie du concert de Benjamin Biolay au Cirque royal en septembre, mais c’est vrai que j’ai peu tourné. La pandémie a été dramatique pour le secteur artistique. Et malheureusement, beaucoup d’artistes manquent de promotion. Seuls les plus populaires sont mis en avant. Et si le digital est un bon outil, la radio et la TV restent indispensables pour élargir son public.
Etes-vous une femme particulièrement exigeante ? Oui. Je n’aime pas les compromis ni les calculs. Je marche à l’instinct, aux rencontres. Ma vie artistique s’est construite au fil des rencontres.
2023 sera-t-elle l’année Stéphanie Blanchoud ? Je l’espère. « Ennemi public », « La Ligne », le duo musical avec Biolay et aussi « Le temps qu’il faut à un bébé girafe pour se tenir debout », un texte (l’histoire d’un frère et d’une sœur confrontés au temps réglementaire des visites à la prison des femmes où est détenue leur mère – nda) mis en scène au Rideau de Bruxelles où, dès février, je partage les planches avec Laurent Capelluto.