Bérangère McNeese
« J’aime le travail solitaire de l’écriture et du jeu »
MOTS : SERVANE CALMANT
PHOTOS : ANTHONY DEHEZ
COIFFEUR ET MAKE-UP ARTIST : LUC DEPIERREUX
Actrice belgo-américaine, elle s’impose à la télévision dans deux séries qui ont fait un récent carton, « HPI » et « Des gens bien ». Scénariste et cinéaste, elle obtient le Magritte du meilleur court-métrage pour son film « Matriochkas ». Non contente de gagner sur tous les tableaux, la brune piquante a du caractère à revendre, le rire franc, la frange élégante et un charme fou. Et Bérangère McNeese de devenir peu à peu incontournable…
Le shooting de Bérangère McNeese a lieu au Soko Rooftop, au 11e étage du building aux escargots, au niveau du carrefour des Quatre Bras de Tervueren. Ce bar haut perché festif propose une vue à 360 degrés sur la forêt de Soignes. Bérangère a passé 15 ans à Paris, le Soko, elle le découvre à la faveur de notre interview. « Quel spectacle. Je n’imaginais pas Bruxelles aussi verte. Je reviendrai en soirée. » Elle a bien raison, d’autant que de tout là-haut, voir le soleil se coucher est un event en soi !
Vous êtes née à Bruxelles d’un père américain et d’une mère belge. Une double culture dans laquelle vous avez puisé une richesse … J’ai principalement grandi en Europe, à Bruxelles puis à Paris où je suis partie dès l’âge de 18 ans. Dans le Kentucky, aux Etats-Unis, je m’y rendais surtout en été et à Noël. Ado, je fantasmais sur le lycée américain et je rageais d’être coincée en Belgique. Aujourd’hui, je suis fière d’être européenne, et intimement, je me sens belge.
Vous venez d’une famille d’artistes ? Oui, du côté paternel. Ma grand-mère était comédienne, mon père, Barry McNeese, est bassiste, il a joué avec les plus grands (Adamo, Bashung, Philippe Lafontaine, nda). Il a cependant quand même flippé quand je lui ai annoncé que je voulais faire du cinéma ! Mais comme j’ai commencé très jeune à tourner dans des pubs et des courts-métrages, on a vite compris, dans ma famille, que je voulais absolument jouer et que j’allais tout faire pour devenir actrice.
Pour réussir, beaucoup d’artistes belges montent à Paris. Vous y êtes d’ailleurs restée 15 ans… Partir à Paris à 18 ans, après mes études secondaires, m’a permis de rencontrer mon tout premier agent, qui m’a mis le pied à l’étrier. Je n’oublie pas que la France et le public français, à travers notamment le succès phénoménal de « HPI », m’ont apporté une reconnaissance incroyable.
« HPI » a réalisé sur TF1 un record d’audience, « Des gens bien », une coproduction RTBF/ Arte, a également cartonné, vous avez du flair ! Ce fut un jeu d’enfant d’endosser pareils personnages (Daphné la policière procédurière et Linda qui monte une arnaque à l’assurance, nda) parce que leur psychologie, leurs émotions, leurs actions ont été soigneusement écrites. L’écriture, c’est la base.
Jouer Linda Leroy, le rôle féminin principal de la série « Des gens bien », devait être particulièrement jubilatoire… Oh oui, car la série oscille entre le drame social et la comédie noire. Il me fallait rester sérieuse même dans les scènes à l’humour décapant. C’était jouissif, en effet.
Il y a un an, vous quittez pourtant Paris pour revenir à Bruxelles… Oui mais j’ai gardé un pied-à-terre parisien. Je dois vous avouer que je suis une travail-
leuse acharnée qui essaie depuis un an de prendre le temps de se poser. Pendant longtemps, toute ma vie même, un grand besoin de reconnaissance m’a poussée à travailler beaucoup, pour me prouver « je ne sais quoi ». J’ai décidé de faire la paix avec cette course en avant. Cette volonté de ralentir le rythme correspond à mon retour à Bruxelles où il me sera plus facile de trouver l’espace mental et l’inspiration nécessaires à l’écriture de nouveaux projets.
Vous avez également écrit et réalisé trois courts-métrages, tous primés en Belgique et à l’international, dans un registre plutôt social. Quels sont les thèmes qui vous bottent ? J’aime écrire la richesse des relations et la complexité des rapports humains, avec un ancrage social en effet, et des personnages féminins.
Pourquoi vous tiennent-elles à cœur, ces femmes ? Parce que je puise dans mon expérience personnelle. Les filles de mes courts-métrages ont entre 16 et 34 ans. Quand j’ai écrit et tourné « Le Sommeil des Amazones », en 2014, j’avais 25 ans. Mes personnages s’inspirent de mon ressenti, à une époque donnée.
En revanche, quand vous êtes actrice, vous vous lâchez ! Ah oui, j’aime expérimenter de nouveaux uni-
vers et genres cinématographiques. « Braqueurs » est une série sur les gros bas, « Des gens bien » flirte avec le burlesque, la comédie « HPI » plait pour sa légèreté. Et prochainement, je serai à l’affiche de « Veuillez nous excuser pour la gêne occasionnée », une comédie du Belge Olivier Van Hoofstadt (Dikkenek, Go Fast, Lucky, nda) avec, comme d’habitude chez Olivier, une galerie de personnages secondaires bien trempés.
Une jeune carrière éclectique qui vous évite de vous voir coller une étiquette … Exactement. Après le succès d’« HPI », ce serait dommage de recevoir uniquement des propositions de comédie policière !
Dites, trois courts, en voilà un bon tremplin pour un premier long ! (Rire). Mon premier long-métrage est écrit, ce sera une coproduction franco-belge en mode financement à l’heure où je vous parle. Mais je ne peux pas vous en dire plus, je suis trop superstitieuse. Et j’ai un deuxième projet, un film d’époque, qui est en phase d’écriture…
Deux projets d’écriture, carrément. Etes-vous une hyper active ? Je suis percée en plein jour !
Etre scénariste vous rend-il plus exigeante dans le choix de vos films ? Probablement, mais en tant que comédienne, j’adore me laisser surprendre. J’accepte des rôles que je n’aurais sans doute jamais écrits moi-même. Parallèlement, réaliser des films m’aide énormément dans mon travail d’actrice, car j’ai pleinement conscience de tout le travail fourni par le réalisateur en amont d’une journée de tournage. J’ai une plus grande empathie pour le métier de réalisateur, ce qui me permet d’appréhender mon métier d’actrice différemment.
Des trois casquettes, quelle est votre préférée ? Ecrire et jouer. Réaliser, c’est être chef d’orchestre, je préfère le travail plus solitaire de l’écriture et du jeu.
Bérangère sera à l’affiche de :
« Veuillez nous excuser pour la gêne occasionnée ». La comédie du Belge Olivier Van Hoofstadt sortira dans nos salles fin juillet.
« Braqueurs » (saison 2). A voir sur Netflix.
« Des gens bien ». Les Belges Matthieu Donck, Stéphane Bergmans et Benjamin d’Aoust, les créateurs de la série, ont confirmé une saison 2 pour 2024.
« HPI ». Une 4e saison est actuellement en cours d’écriture.
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