Astrid Whettnall
« J’ai échappé aux rôles clichés de ‘mère de’ ou ‘femme de’ » …
Mots : Servane Calmant
Photo : Sylvia Galmot
Saluée pour sa récente performance dans la mini-série « De Grâce », tragédie familiale ancrée dans le monde des dockers, la pertinente Astrid Whettnall sera à l’affiche d’une nouvelle série-événement, «Winter Palace», épopée du premier palace en montagne diffusée sur Netflix cet hiver. Papote avec une actrice belge inclassable.
Winter Palace, cette série télévisée suisse ambitieuse sera diffusée prochainement sur Netflix. Quel est son pitch ? Nous sommes en 1899, André Morel, jeune hôtelier visionnaire, rêve de créer le tout premier palace alpin 5 étoiles d’hiver. Pour réussir ce pari fou, il s’allie à un aristocrate britannique… A l’heure où je vous parle, « Winter Palace » est en compétition au Festival de la fiction de la Rochelle. C’est donc une fresque très attendue, en effet. Elle est inspirée de faits réels et réalisée par Pierre Monnard (à qui l’on doit notam-ment la série « Hors-Saison » – nda). Les personnages qui peuplent l’hôtel affichent tous un profil très différent, ce qui permet à « Winter Palace » d’offrir aux spectateurs une analyse sociologique pertinente des différentes strates sociales… Pour ma part, je joue une aristocrate autrichienne qui se prend pour une grande artiste internationale. C’est un personnage extravagant dans une série-chorale divertissante qui mêle avec brio ambition, amour, féminisme aussi, et une touche d’intrigue policière. Le tout tourné dans des pala-ces historiques de Montreux, en costumes d’époque. Cet hiver, préparez-vous à être ébloui.e…
Le luxe des palaces vous fait-il rêver ? Honnêtement, non. Je suis plutôt « roots », mais j’ai adoré tourner dans le cadre enchanteur des Alpes suisses.
Vous jonglez entre ciné et télé. Prochainement, vous serez à l’affiche de « Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan », un long-métrage de Ken Scott, et vous venez d’achever le tournage de la série « La rebelle, les aventures de la jeune Georges Sand ». On dit qu’un film serait l’œuvre d’un cinéaste ; une série, le fruit d’un scénariste. Qu’en pensez-vous ? Les règles ont bien changé avec l’essor des plateformes comme Netflix ou Amazon Prime Video. Aujourd’hui, on parle volontiers de séries d’auteur/d’autrice. J’ai récemment tourné dans des séries comme « Baron noir » ou « De Grâce » où le scénario est excellent et où l’univers visuel est également très marqué. Mais c’est vrai que pour tenir une série sur plusieurs saisons, il faut un « page turner », des rebondissements captivants, sans quoi…
Le principal atout du format série pour un acteur/actrice ? Le luxe de pouvoir développer un personnage dans le temps et de l’emmener dans mille et une aventures …
Est-il aisé de passer d’un format à l’autre ou est-on vite catalogué ? Heureusement, j’ai commencé par le cinéma. Plus sérieusement, aujourd’hui, la frontière entre cinéma et télévision est ténue, pour peu évidemment que l’acteur/actrice fasse les bons choix. J’ai eu la chance de jouer tellement de rôles différents, qu’on arrive difficilement à me cataloguer.
Votre Magritte pour « La route d’Istanbul » de Rachid Bouchareb (où Astrid joue le rôle d’une mère qui part au Moyen-Orient à la recherche de sa fille radicalisée) a-t-il changé votre carrière ? C’est toujours difficile de mesurer l’impact d’un prix. Une certitude : le Magritte apporte un coup de projecteur sur le film lauréat et ses interprètes. C’est aussi un gage de confiance pour un producteur, notamment international.
En France, à peine 6 % des actrices de plus de 50 ans décrochent des rôles. Que vous inspire ce constat ? C’est un constat alarmant mais pas surprenant. Ce phénomène de déclassement touche aussi les productrices, les réalisatrices, les techniciennes, et plus largement les femmes en entreprise. Mais je suis convaincue que quand la vieille garde sera partie, la nouvelle génération saura déconstruire cette discrimination. Elle a déjà commencé.
Vous semblez plutôt épargnée par ce déclassement … C’est vrai ! J’ai débuté ma carrière cinématographique vers 40 ans, donc le petit milieu du cinéma n’a pas eu le temps de me voir vieillir… (rires). Paradoxalement, on me propose aujourd’hui des rôles plus intéressants et variés qu’à mes débuts. Grâce à des réalisateurs comme Rachid Bouchared et Vincent Lannoo qui m’ont offert des personnages forts, j’ai échappé aux rôles clichés de « mère de » ou « femme de ». La nouvelle génération réalise des films sur la société d’aujourd’hui, expurgée des valeurs patriarcales. Tant mieux pour nous, les actrices et les femmes.
Qu’avez-vous découvert sur vous-même grâce à vos rôles ? Chaque rôle m’offre un nouveau regard, une nouvelle perspective sur le monde. J’ai une seule vie, mais avec le cinéma, j’en vis des centaines par procuration.
Un réalisateur belge avec lequel vous rêveriez de travailler ? Ils sont nombreux ! Lukas Dhont, Bouli Lanners, Delphine Girard, sans distinction nord-sud. J’adore le cinéma belge. Il est à l’image de notre pays, honnête, authentique, sincère, jamais pompeux, et résolument ouvert sur le monde.
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