Artisan, une profession de foi
Mots : Servane Calmant
Photo : Le Mariage d'un Haïku
Il y a sept ans, Marie Brisart prenait un véritable virage professionnel pour travailler la terre de ses mains. En tournant et tournant encore, elle devint artisan potière. Depuis, elle a réussi à imposer son style, en créant dans son atelier à Hennuyères, de jolies pièces, des assiettes, des bols, des coquetiers, principalement utilitaires. Marie n’a aucun regret. L’artisanat, c’est sa voie.
L’enseignement et le monde associatif, c’était sa vie d’avant. Avant que notre compatriote Marie Brisart ne ressente l’urgence de se reconnecter à la terre. « A vrai dire, j’ai toujours cherché le contact avec la terre : j’ai fréquenté l’Académie des Beaux-Arts de Boitsfort qui a été une grande source de satisfaction et une licence en anthropologie a confirmé mon intérêt pour la culture matérielle… »
Devenue trentenaire, Marie interroge sa vie professionnelle, mais c’est un drame personnel, la perte d’un être cher, qui va définitivement la pousser à se tourner vers une activité plus en phase avec son vécu et ses aspirations. Il y a 7 ans, elle décide de devenir potière. D’en faire son métier donc. A plein temps. Et quand on lui demande de nous raconter une journée à l’atelier, elle prévient : « Ce n’est pas un hobby, un passe-temps, un atelier-céramique, mais bel et bien une vraie journée de travail, je démarre très tôt et je m’arrête pour aller rechercher les enfants à l’école … » Toute la journée, Marie tourne, tourne, tourne ! Ses pièces, elle les façonne en effet au tour de potier, « j’utilise donc un plateau rotatif sur lequel je centre une motte d’argile en me servant de la force rotative ». Est-ce en tournant qu’on devient céramiste ? « Exactement, comme on apprend à écrire quand on est petit. Ce n’est absolument pas instinctif. Il faut jouer avec la force centrifuge, le geste répétitif s’imprime alors progressivement dans l’inconscient. Cette technique artisanale fort ancienne nécessite une pratique soutenue ; avec le temps, le geste devient plus précis, les pièces deviennent plus régulières… ». L’enthousiasme à la tâche de Marie est palpable, l’artisanat, c’est une profession de foi, « qui exige beaucoup d’implication, de travail, de formation, de documentation, de sérieux, je ne me vois pas faire ce travail en dilettante ! »
La question de l’utilitaire
Marie Brisart tire essentiellement son inspiration des céramiques japonaises et du design européen des années 50. Les pièces qu’elle produit sont sobres, épurées. « Je suis ultra méticuleuse, il y a beaucoup de calcul dans ma démarche, les bols d’une même série doivent avoir les mêmes dimensions. Je suis très exigeante avec moi-même. D’où mon intérêt pour l’art japonais à la fois épuré et très abouti, très maîtrisé. » Des pièces, bols, assiettes, coquetiers, esthétiques certes mais avant toutes choses utilitaires : « j’ai mis un point d’honneur à placer l’utilitaire au cœur de mon travail. Je souhaitais en effet créer des objets qui servent dans la vie de tous les jours. » Est-ce là une démarche qui s’appuie sur une réflexion anticonsumériste ? « Il y a quelque chose de vibrant dans un objet utilitaire et j’adhère effectivement à des mouvements comme le Less is More… »
Son actu
Marie Brisart a récemment créé des assiettes sur mesure pour le restaurant Sanzaru à Bruxelles, qui met à l’honneur la cuisine Nikkei entre Japon et Pérou, et ouvert une petite boutique dans le centre de Bruxelles (14 Petite rue des Bouchers) où elle reçoit les amateurs d’artisanat les vendredis de 10 à 18h. Et l’avenir ? « Je dois bien vous avouer que suis en plein dilemme car les commandes d’assiettes notamment explosent, or je ne vois pas comment me développer davantage sauf à travailler plus vite ce qui reviendrait à tuer l’âme même de mon travail d’artisan ou à déléguer, mais je ne peux m’y résoudre ! Je gère tout aujourd’hui, même les réseaux sociaux. L’idée de collaborer avec d’autres restaurants me ravit évidemment … Je trouverais bien une solution ! »
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