Sarah Bovy
Le sacre de la passion
Mots : Barbara Wesoly
Photos : Stefano Arcari
Le parcours de Sarah Bovy a le parfum des victoires conquises par la témérité. Profil brillant et atypique des paddocks, la pilote bruxelloise des Iron Dames est devenue une figure incontournable des compétitons d’endurance, dont rien ne semble aujourd’hui pouvoir freiner l’ascension.
En décembre 2023, vous avez remporté le titre de Pilote de l’année décerné par le Royal Automobile Club de Belgique, devenant la première femme à recevoir cette récompense. Celle-ci venait aussi couronner 25 ans de carrière. Que représentait-elle pour vous ? J’en étais extrêmement émue. Cette distinction est accordée par les journalistes mais aussi par le top 10 des pilotes de notre pays, et vise à distinguer la personne qu’ils estiment être la meilleure représentation du sport automobile belge à l’international. Avoir la reconnaissance de mes pairs, que j’admirais déjà pour certains bien des années avant de concourir, était un honneur incroyable. Et d’autant plus après toutes ces années d’acharnement à la conquête de ce rêve.
Qu’est-ce qui justement vous a conduit à la course automobile ? Un coup de foudre, à douze ou treize ans, lors d’une session de karting, organisée par des copains. C’était la première fois que je touchais à un volant et ça a été une véritable révélation. Mon père était pilote de course mais a arrêté avant ma naissance. De mon côté je pratiquais beaucoup de sport dans l’enfance, mais plutôt de l’escalade, du foot, du basket… Ce moment a tout changé. J’ai abandonné toutes les autres disciplines pour me lancer pleinement sur circuit. Mais ne venant pas d’une famille aisée, à même de financer ma carrière, j’ai entrepris des études en marketing, en espérant avoir ainsi le bagage nécessaire pour trouver plus facilement des sponsors. Et je suis finalement devenue recruteuse de talents dans l’industrie pharmaceutique afin de payer mes factures tout en continuant à rouler le week-end. Un poste que j’ai conservé durant 6 ans, avant d’enfin pouvoir me consacrer à l’automobile.
Vous est-il arrivé de douter et d’imaginer rendre le volant ? Oui, sans cesse, durant près de 20 ans. L’incertitude a toujours été là, doublée par moments de la frustration de voir certaines opportunités m’échapper, par manque de chance ou d’argent. Mais je refusais d’arrêter de me battre. C’était ma seule certitude. Et ce, malgré des obstacles parfois immenses. Après mes années en entreprise, j’avais certes réussi à vivre de ma passion mais en tant que pilote événementielle. J’étais alors instructrice sur circuit, envoyée sur des missions par Lamborghini. Et puis la crise du Coronavirus a frappé le monde de plein fouet, mettant à l’arrêt mon activité. Je ne voyais plus d’issue me permettant de rester professionnelle dans le domaine et j’ai donc débuté une formation pour devenir toiletteuse pour chiens, les animaux étant ma deuxième passion.
C’est alors que votre route a croisé celle des Iron Dames, premier équipage en sport automobile 100% féminin, créé par Deborah Mayer. Oui, par un incroyable hasard. Je les suivais depuis leur lancement, mais elles étaient au complet. Jusqu’au jour où est apparu un post Instagram dans lequel elles annonçaient le départ de l’une de leur pilotes, à une semaine du lancement de la saison 2021. J’ai envoyé un mail sans y croire. Une bouteille à la mer. Au cas où il leur faudrait une remplaçante. Et le soir même, Rahel Frey, désormais ma coéquipière depuis quatre ans m’appelait pour que je rejoigne la team. 12h après mon arrivée au sein des Iron Dames, je montais dans ma voiture pour une première course.
Sur votre site, on peut lire cette citation : Life is racing. Anything before or after is just waiting. Cela correspond-il pleinement à votre vision ? Cette phrase prononcée par Steve McQueen dans le film Le Mans, est très symbolique pour moi. Elle exprime une sensation que j’ai ressenti tant de fois. A certaines époques de ma carrière, une année pouvait s’écouler sans que j’ai l’occasion de monter sur un circuit. Mais mon envie furieuse d’y être ne disparaissait jamais. Dès que mon téléphone sonnait, j’espérais le coup de fil qui me remettrait en piste. Aujourd’hui j’ai la chance de réaliser 20 week-ends de course par an et l’attente est devenue bien plus courte, mais je garde le souvenir de ce sentiment au fond du cœur.
Comment imaginez-vous désormais la suite de votre route ? J’espère avoir la possibilité de savourer cette deuxième chance le plus longtemps possible. Depuis mes débuts en compagnie des Iron Dames, j’ai vécu des moments très forts. La victoire en Gold Cup, aux 24h de Spa en 2022. Ou encore celle à Bahreïn l’année dernière. Je vise toujours plus haut. La compétition existe par et pour la performance et les résultats. Mais surtout, je souhaite que nous puissions, en tant qu’équipe, inspirer chacune à entreprendre et à oser. Et marquer non seulement l’histoire du sport mais aussi celle des femmes.
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