Kody
A la conquête du monde !
Mots : Servane Calmant
Photos : Anthony Dehez
C’est quand Kody se lâche qu’il est le meilleur. Quand il incarne et caricature Jean-Paul Belmondo, Karl Lagerfeld, Jean-Claude Van Damme, Yves Van Laethem ou encore Amanda Lear, avec une saveur jubilatoire et un humour contagieux. A la ville, paradoxalement, le Bruxellois toujours aussi sympa, est néanmoins plus posé, d’un calme presque olympien. « La scène et les caméras me servent d’exutoire. En privé, j’aime la fête mais je fais moins mon malin qu’à la télé ! » Rencontre avec l’un des humoristes et comédiens les plus populaires de Belgique et, dans un avenir plus ou moins proche, une star aux Etats-Unis. On lui souhaite.
On rencontre Kody au Kiosque, le café-restaurant du Bois de la Cambre à Bruxelles. Il revient de Lubumbashi et de Los Angeles avec, dans sa valise, un beau projet artistique et l’espoir de voir concrétiser un rêve d’ado …
On annonce la Good News à nos lecteurs ? Allez, oui ! Je viens de signer chez CAA en Californie, une agence de talents (la plus importante même ! nda) qui représente notamment Steven Spielberg, Georges Clooney, Brad Pitt, Omar Sy… et moi désormais ! (rire)
Félicitations ! Merciiiiii.
Alors, acteur plutôt qu’humoriste ? Acteur !
On va y revenir, le temps de rembobiner jusqu’à votre enfance. Gamin, Kody faisait-il déjà rire ses camarades de classe ? Oh, non, j’étais trop timide ! Je faisais un peu le fou avec mes cousins, c’est tout. Il a fallu attendre l’adolescence pour que je choisisse l’option « Arts d’expression » au collège Cardinal-Mercier à Braine-l’Alleud. Depuis ce moment-là, je sais que je veux devenir acteur. C’est d’ailleurs à la même époque, vers 15 ans, que j’ai compris que je pouvais faire rire. J’imitais notamment des professeurs (rire) dont celui de math. Et déjà Belmondo.
Feu votre père, ambassadeur à Bruxelles, vous destinait probablement à une autre carrière … Oui oui ! Mais mon père avait beaucoup d’humour et d’éloquence, il arrivait à capter l’attention des gens. Jeune, il habitait dans le même quartier que Papa Wemba, avec lequel il avait formé un petit groupe musical et il aimait bien pousser la chansonnette aux fêtes de famille. Il y a peut-être une petite fibre artistique dans mon patrimoine génétique !
Le stand-up, un tournant ? J’avais déjà 28 ans quand j’ai rejoint la bande du Kings of Comedy. Mes amis me poussaient à avoir un travail « sérieux », qui paie, et à jouer à mi-temps. Mais je ne voulais pas réaliser mon rêve « à côté » ! Alors, je suis devenu humoriste à plein-temps.
Acteur, humoriste, ce n’est pas le même métier … Mais je n’ai jamais voulu devenir humoriste ! C’était un moyen pour devenir acteur. Mes idoles de l’école américaine, les Eddie Murphy et Robin Williams sont tous passés par le stand up …
Parlons du Grand Cactus*. Sept saisons déjà au compteur et plus d’une centaine de personnages à votre actif ! Etes-vous un imitateur ? Non. Je ne suis pas un imitateur plutôt un ‘incarnateur’. Il m’arrive de jouer sur l’identité vocale de la personne que j’incarne, mais le plus souvent, je travaille sur la gestuelle et les tics de langage, que je caricature. Et le texte aussi voire surtout.
Qui écrit les textes du Grand Cactus ? Jérôme (de Warzée – nda) et quatre auteurs. J’apporte ma touche personnelle, et comme j’aime beaucoup sortir du texte et du cadre, l’improvisation joue un rôle très important dans la manière dont j’aborde tel ou tel personnage …
Y’a-t-il des personnages impossibles à incarner ? Parfois, j’hésite. Jamais mais jamais, je n’aurais imaginé être capable de jouer Amanda Lear ! C’est une véritable révélation. (rire).
Votre caricature de Belmondo est l’une des plus fameuses. Vous l’avez rencontré il y a deux ans, racontez-nous ! C’était fabuleux ! Je reçois un coup de fil d’un ami de Belmondo à venir le rejoindre dans le sud de la France, sous prétexte que Bébel adore mes sketches ! Je suis estomaqué et fou de joie à la fois, et je prends l’avion. Je n’oublierai jamais ce moment : des heures de rigolade avec mon idole, à l’imiter avec son cigare évidemment ! Ah, j’aurais tellement aimé jouer dans « L’As des as ». L’aventure et la comédie, c’est ce qui me botte le plus, alors l’union des deux dans un même film …
Jouer Zemmour, est-ce particulièrement jubilatoire ? (Rire). Je ne savais pas comment l’aborder ! Jonathan Lambert qui l’avait fait chez Ruquier, dans On N’est Pas Couché, avait placé la barre très haut … Il y a deux éléments qui interviennent pour parvenir à créer l’illusion : le texte et le jeu. J’ai notamment isolé son « Ben voyons », qui est devenu son slogan lors de sa campagne, et la magie a opéré.
Avez-vous déjà loupé un sketch ? Oh oui, plusieurs fois. Le public ne rigole pas toujours au moment où l’on s’y attend. Je dirais même plus : dans Le Grand Cactus, par saison, il y a cinq personnages qui cartonnent, tout au plus. Par chance, le public ne retient que ceux-là !
Les chouchous du public ? Belmondo, Lagerfeld, Van Damme, Depardieu.
Ne craignez-vous pas de rester coincé dans ce rôle d’humoriste du Grand Cactus ? Si, c’est ma plus grande hantise. Car une carrière, c’est un marathon, pas un sprint. Je pense d’ailleurs signer pour une saison supplémentaire, pas davantage. Cela dit, Le Grand Cactus, c’est aussi un tremplin extraordinaire : l’émission TV en replay sur Auvio et sa page Facebook m’offrent une visibilité incroyable en France et à l’étranger.
Votre popularité au sein de cette émission vous a donc ouvert des portes ? Elle m’a notamment permis de rencontrer Mathieu Rochet, un réalisateur français qui m’avait vu dans Le Grand Cactus, et qui m’a offert le rôle phare de sa web-série, « Lost in Traplanta », co-produite par Arte et la RTBF. J’y joue Larry, un Français qui part à la recherche des membres du groupe légendaire Outkast et découvre le mouvement trap d’Atlanta. Cette série documentaire a été primée à la Rochelle, à Berlin et au Marseille Web Fest. Le succès fut tel, que Mathieu Rochet signe une saison 2, californienne celle-ci, au coeur de la West Coast, berceau du gangsta rap.
Comment est considéré l’artiste belge aujourd’hui en France ? On est passé du petit Belge, au Belge avec un grand B. Je crois qu’ils ont peur de la mafia belge de l’humour !
Et de votre voyage à Lubumbashi, qu’avez-vous rapporté ? L’écriture d’un projet de documentaire sur la rumba congolaise, qui sera probablement tourné par Mathieu Rochet également.
Votre carrière cinéma est également sur des rails… Oui, mais la crise du Covid n’a pas épargné les récents films dans lesquels j’ai joué ! « Lucky » d’Olivier Van Hoofstadt a vu son exploitation arrêtée en pleine crise et « Losers révolution » de Thomas Ancora et Grégory Beghin est sorti après diffusion en VOP et sur Tipik. On a vécu une période très compliquée ! J’ai également tourné dans « Match », une série belge produite par Be TV…
Et la scène ? Je suis en pleine phase d’écriture de mon prochain spectacle où je serai seul en scène, et qui s’appellera probablement « Oui ». Tout simplement parce que je ne sais jamais dire Non ! Le rendez-vous avec le public est fixé en septembre, dans de belles salles partout en Belgique.
Et à la ville, il est comment Kody ? Je ne suis pas aussi exalté et exubérant qu’un Roberto Benigni ! Je suis un calme qui ose sur scène et devant les caméras, ce qu’il n’oserait probablement pas faire dans la vie. Et ce métier de comédien est tellement beau, qu’il me permet de vivre plein d’expériences différentes. D’avoir plusieurs vies en quelque sorte.
* L’émission humoristique de la RTBF pilotée notamment par Jérôme de Warzée, anciennement sur La Deux est désormais sur Tipik.
Abonnez-vous dès aujourd’hui pour recevoir quatre numéros par an à votre porte
Vous aimerez peut-être
Carine Doutrelepont – L’image comme écriture du monde
Carine Doutrelepont, avocate et photographe, explore la nature et la diversité humaine. Son…
Un siècle de surréalisme belge – Deux expositions majeures pour célébrer un mouvement révolutionnaire
Deux expositions célèbrent le centenaire du surréalisme : à Mons, son héritage subversif, et à…
Stéphanie Crayencour – « Perdre mon frère a marqué le point de départ de ce livre et de ma véritable histoire d’amour avec lui »
Stéphanie Crayencour, actrice entre Bruxelles et Paris, se tourne vers l’écriture avec Le Papillon…